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et par le ministère du pape, il le transportait au roi des Francs (1). Peut-être est-il vrai qu'en reconnaissance Charles le Chauve lui céda tout droit de souveraineté sur Rome; mais plus probablement il ne fit que dispenser le pape et son peuple de l'hommage qu'ils rendaient à l'empereur.

Martin II, Toscan d'origine, n'eut qu'un règne de quinze mois; et son successeur fut Adrien III, à qui l'on attribue un décret où l'empereur est exclu de l'élection des pontifes. II refusa de réintégrer dans la communion des fidèles Photius, condamné par son prédécesseur. Étienne VI, qui le remplaça, déploya la même fermeté à ce sujet, en faisant connaître à l'empereur de Byzance les limites respectives de l'autorité pontificale et de la puissance impériale.

Formose, évêque de Porto, envoyé par Nicolas chez les Bulgares, avait été déposé, sans qu'on en sût le motif, par Jean VIII, puis rétabli par Martin II; enfin, à la mort de ce pape, il fut élevé au siége de Rome. Cette translation d'un siége à un autre était encore presque sans exemple; c'était un cas si extraordinaire qu'on y voyait un divorce, un crime: aussi lorsque, après son pontificat et celui fort court et bientôt annulé de Boniface VI, Étienne VI s'empara de la tiare, ce pape donna un nouveau scandale à l'Église en faisant exhumer le cadavre de Formose, qui, placé sur le trône et revêtu des habits pontificaux, fut mis en jugement, comme ayant abandonné pour une autre épouse sa première épouse, le diocèse de Porto. Une condamnation ayant été prononcée, on lui fit trancher la tête et les trois doigts avec lesquels il bénissait, et on jeta ses restes dans le Tibre, en déclarant non consacrés ceux qui avaient reçu de lui l'ordination.

Les partisans de Formose se soulevèrent pour le venger de ces indignes violences, et étranglèrent Étienne, dont les actes furent annulés par Romain. Ce dernier est aussi considéré comme antipape par quelques-uns, qui n'admettent pour légitime que Théodore II.

(1) La formule de l'élection de Charles le Chauve, employée par Jean VIII dans les actes du concile de Rome, en 887, est remarquable : « Nous l'avons élu avec justice, et avons été approuvé par le consentement et le vœu des évêques, nos frères, et des autres ministres de la sainte Église romaine, de l'illustre sénat, de tout le peuple romain, et de l'ordre des citoyens; et nous l'avons solennellement élevé à l'empire, conformément à l'ancienne coutume, et décoré du titre d'Auguste. »

884.

Formose.

891.

898.

898.

904

914.

On voit à quel point la confusion régnait au centre de la chrétienté. Les grands seigneurs romains, dont la force s'était accrue à l'intérieur, combattaient cette autorité qui s'était tant étendue au dehors; et ils s'efforçaient d'élever au saint-siége des papes qui fussent sous leur dépendance, afin d'écarter l'obstacle mis à leur tyrannie par des pontifes qui seraient honorés pour leur dignité, redoutés pour leur puissance. Une faction s'était formée parmi eux dans le but d'arrêter l'intervention des rois alle mands, non pas tant par esprit national que pour rencontrer moins d'entraves dans leurs projets et faire la loi à leur gré. Adalbert II, marquis de Toscane, en était le chef avec Théodora, sa parente, à qui ses richesses et ses mille séductions avaient acquis une grande influence; elle était secondée d'ailleurs ses deux filles : l'une, du même nom qu'elle, était mariée au consul Gratien; l'autre, appelée Marozia, était femme d'Albéric, marquis de Camerino et comte de Tusculum, le seigneur le plus puissant de la campagne de Rome. Marozia résolut d'élever au pontificat Sergius, son amant, à l'exclusion de Jean IX; mais elle échoua dans sa tentative; et même, après la mort de ce dernier et celle de Benoît IV, Léon V fut préféré; mais le Romain Christophore l'ayant jeté en prison, envahit la papauté, qui lui fut bientôt arrachée par Sergius; et ce nouveau pontife apporta le vice et l'adultère sur ce trône qui avait été illustré par tant de vertus.

par

Voilà à quelle misérable condition l'Église se trouvait réduite par l'intervention des seigneurs dans les nominations, et par le déchaînement de passions toutes matérielles. Sergius, entièrement dévoué à ceux envers lesquels il était redevable de ce haut rang, leur livra le château Saint-Ange. Ils demeurèrent ainsi les maîtres de Rome, et ils auraient pu interrompre cette chaîne de l'épiscopat, qui rattache aux apôtres le pontife régnant. Ils se contentèrent de faire élire qui leur plut, un Anastase III, moins mauvais que les autres; Landon; puis Jean X, l'amant de la jeune Théodora. Il agit mieux qu'on n'aurait pu l'attendre de son indigne origine, et, préoccupé de ses devoirs, de même qu'il défaisait les Sarrasins à la tête des troupes, il cherchait à soustraire le saint-siége à une tyrannie honteuse, en brisant la funeste alliancé des familles seigneuriales. Cette conduite porta ombrage à Marozia, dont le second mariage avec Gui, duc de Toscane, fortifia les liens déjà existants entre les deux maisons de Toscane et de Tusculum, qui restèrent

maîtresses de Rome. Leur premier soin fut de se débarrasser
de l'indoeile Jean, auquel Marozia substitua Léon VI, puis
Étienne VIII, enfin son propre fils Jean XI, qui, s'abandonnant
aux penchants d'une jeunesse sans frein, laissait son ambitieuse
mère et son frère Albéric diriger à leur gré les choses profanes
et sacrées. Ce dernier, devenu maître dans Rome, après avoir
repoussé Hugues de Provence, roi d'Italie, emprisonna Jean,
et le contraignit à envoyer des légats à Constantinople demander
le patriarcat, dont il voulait que son fils Théophylacte, âgé à
peine de seize ans, fût investi, avec concession du pallium
pour lui et pour ses successeurs à perpétuité. Après la mort de
Jean, quatre papes, Léon VII, Étienne IX, Martin III, Agapit
II, furent successivement élus par Albéric, dont l'autorité passa
à son fils Octavius, qui se fit lui-même pontife à l'âge de dix-
huit
ans,
sous le nom de Jean XII.

Jean se trouva le seigneur le plus puissant de l'Italie centrale, dont il ranima les factions. Il appela en Italie Othon le Grand contré Bérenger, et le couronna empereur; mais, loin de lui garder fidélité, il s'unit contre lui avec Adalbert, fils de Bérenger; puis, à l'approche d'Othon, il s'enfuit avec le trésor de saint Pierre, et l'empereur convoqua un concile pour le juger. Les méfaits articulés contre lui sont horribles. Le palais de Latran, converti en lieu de débauche par la licence des femmes qui l'habitaient; des cardinaux et des évêques mutilés, aveuglés, mis à mort; la messe célébrée sans communion; le caprice scandaleux de vouloir ordonner un diacre dans une écurie; le saint ministère concédé à prix d'argent; un enfant de dix ans promu à l'évêché de Lodi; des incendies allumés, au milieu desquels le pape se serait montré avec le casque, le haubert et l'épée; l'impiété portée au point de boire en l'honneur du démon et des divinités païennes : telles étaient les accusations dont l'excès indique quel esprit les avait inspirées. Jean n'ayant pas comparu pour se justifier, sa sentence fut prononcée, et on lui substitua Léon VIII, encore laïque; tant les séculiers s'arrogeaient de prérogatives illimitées ! Aussi les fruits étaient-ils en rapport avec la semence. A peine Othon s'était éloigné, que Jean revint à la tête d'une bande de musulmans; il fut accueilli par les acclamations du peuple, à qui sa haine pour l'étranger dominateur avait fait oublier les scandales du pontife. Jean avait commencé à exercer de terribles vengeances, quand il périt frappé par la main d'un mari outragé.

931.

956.

963.

965.

Crescentius.

972.

974.

985.

91.

Les Romains se hâtèrent d'élire Benoît V; mais Othon ramena l'antipape et conduisit en Germanie l'élu du peuple ; puis, Léon étant venu à mourir, l'empereur nomma de sa propre autorité Jean XIII, qu'il maintint par la force et par les supplices.

Quand on apprit à Rome la mort d'Othon, les factieux relevèrent la tête; Crescentius, fils de Théodora la jeune, arrêta le nouveau pape Benoît VI, et le fit étrangler. Boniface VII, qui lui succéda, fut chassé par une autre faction; la guerre civile éclata. La faction de Tusculum supplia Othon II de faire procéder à une nouvelle élection; en effet, l'évêque de Sutri fut nommé en présence des commissaires impériaux, sous le nom de Benoît VII (1). A sa mort, Othon II plaça sur le siége de saint Pierre Canepanova, évêque de Pavie et chancelier du royaume d'Italie, qui prit le nom de Jean XIV; mais aussitôt la faction de Crescentius, se relevant, l'enferma dans le château Saint-Ange, où elle le laissa mourir, et rappela Boniface, qui, à sa mort, fut traîné par les rues et resta sans sépulture.

Crescentius, maître dans Rome, en chassa Jean XV, puis le rétablit lorsqu'il apprit l'arrivée prochaine d'Othon III.

Ce fut ce Jean XV que Hugues Capet, roi de France, chargea de juger Arnolphe, archevêque de Reims, nouveau Judas, accusé de haute trahison. Les évêques français, répugnant à prononcer dans une affaire où le vote ne pouvait être libre, s'en rapportèrent au pape, reconnaissant de la sorte la juridiction que Nicolas Ier avait revendiquée, et contre laquelle ils avaient protesté. Le pape hésitant néanmoins à prononcer, Hugues Capet, qui dans l'intervalle s'était affermi sur le trône, réunit un concile près de Reims, dans lequel le pontife fut accusé de corruption, et l'archevêque destitué. Jean cassa ces actes, suspendit les évêques qui y avaient pris part, rétablit le prélat déposé, et évoqua le procès à Rome. Bien que les évêques ne lui reconnussent pas ce droit, les moines firent jouer tant d'intrigues, que le roi de France crut prudent de céder et pria le pape de révoquer son décret ; puis, un concile, convoqué à Reims, reconnut les décrétales du faux Isidore, aux termes desquelles toutes les causes des évêques étaient réservées au pape (2).

(1) Si toutefois ce n'est pas le même que Benoît VI, que l'on aurait cru mort en prison. La série des papes n'est pas bien certaine au milieu de tant de désordres.

(2) Sous ce pontife, Rome comptait quarante couvents d'hommes et vingt de femmes, tous de l'ordre de Saint-Benoît; elle possédait en outre soixante églises

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Tandis que la puissance du pontife s'étendait au dehors, luimême dépendait dans Rome des orgueilleux caprices de Crescentius, qui l'en chassa. Othon III venait pour le réintégrer, quand, informé en route qu'il avait cessé de vivre, il résolut de remédier à la corruption italienne en nommant un pape allemand; son choix s'arrêta sur Brunon, jeune homme de vingtquatre ans, fils du duc de Franconie, qui prit le nom de Grégoire V. Il couronna Othon et établit, dit-on, qu'à l'avenir le roi élu par les Germains serait par cela même roi d'Italie et empereur des Romains. Il demanda et obtint la grâce de Crescentius, qui avait été condamné à mort; mais Othon s'était à peine éloigné, que le factieux revint de l'exil plein de colère, et fit, dans son ingratitude, élire Jean Philogate, Grec de naissance, qu'il mit, Jean XVI. ainsi que lui-même, sous la protection de l'empereur byzantin. Othon, revenu avec Grégoire V, s'empara de Crescentius et de l'antipape; celui-ci fut mutilé et conduit sur un âne par les rues de Rome au milieu des outrages de la populace; l'autre, mis à mort avec douze chefs de quartier. Mais Othon s'était laissé séduire par les charmes de Stéphanie, veuve de Crescentius, et il donna à son fils la préfecture de Rome, ce qui lui aliéna les comtes de Tusculum. Néanmoins, à peine eut-il cessé de vivre, empoisonné, dit-on, par Stéphanie, que Jean gouverna Rome à son gré, avec le titre de sénateur, comme avait fait Crescentius, son père.

Grégoire enjoignit à Robert II, roi de France, de répudier Berthe, sa parente; et comme il refusait d'obéir, il suspendit les évêques qui avaient béni le mariage ou y avaient assisté. Le culte se trouva ainsi interrompu, et les murmures du peuple obligèrent Robert à céder : nouveau triomphe de la justice papale sur les rois.

Grégoire fut excité dans cette circonstance par Gerbert, moine de l'Auvergne, puis abbé de Bobbio; après la mort d'Othon II, il quitta l'Italie, se retira à Reims, où il ouvrit une école dans laquelle il eut pour disciple Robert lui-même (1). Il écrivait à un religieux : « Tu sais avec quelle ardeur je cherche partout

avec des chanoines. La première canonisation régulière eut lieu en 993, pour saint Uldarich, évêque de Hambourg, mort vingt années auparavant.

(1) Nous avons de lui la vie de saint Adalbert, archevêque de Prague, cent quarante-sept lettres, et quelques ouvrages de mathématiques. Il en a été publié un sur la dialectique, dans le Thesaurus anecdolorum de Pez (t. I, p. 2).

997.

1002.

Gerbert.

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