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river et de rassembler (1) quatre ou cinq mauvais sujets à la tête desquels il osa exécuter son infàme projet. Ainsi une poignée d'hommes, aussi criminels qu'audacieux, entreprit et consomma cet attentat contre la liberté et la personne du roi, sans que ce prince essayât de leur opposer aucune résistance en permettant aux trois gardes-du-corps qui

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(1) « Médiocrement affecté de l'espèce de petite agitation qu'il venait de remarquer dans les rues de Varennes, sans en tirer une grande conséquence, M. de Valory s'achemina au galop vers le carrosse du roi. Quels furent sa cruelle surprise et son vif désespoir quand voulant rendre compte à Sa Majesté, elle lui dit : François! nous sommes vendus ! » Un courrier qui vient de passer a défendu aux postillons » d'aller plus loin, et leur a ordonné, de par la nation, de dételer, ajoutant qu'ils menaient le roi.» (Relation de M. de Valory, p. 41 et 42.)

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Comment ne vint-il pas dans l'idée des deux gardes-ducorps qui étaient auprès de la voiture, d'arrêter ce courrier? Drouet dit aussi dans son rapport « que, lorsqu'il arriva à Va>> rennes, les voitures étaient à l'entrée de la ville, le long

des maisons, et qu'il y avait une dispute entre les postillons ⚫ et les conducteurs des voitures. » (P. 140.) Ces deux récits assez conformes montrent le fond que l'on doit faire sur la déclaration du palefrenier James Brisac, dont M. de Choiseul appuie sa relation, et où il dit qu'il vit passer un homme qui avait déjà traversé la ville et qui prenait la route de Stenay; qu'il demanda à cet homme ce qu'il voulait; que

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» celui-ci lui répondit qu'il courait après une voiture, et qu'il appelait du monde pour savoir si on l'avait vue passer ;.....

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qu'il ne devait pas y avoir plus d'une demi-heure qu'elle était passée. » (P. 158 et 159.)

l'accompagnaient, et que leur service soumettait à une obéissance passive, de faire usage de leurs armes et de leur courage. Aucune menace, aucune promesse ne fut employée pour faire avancer les postillons, qui s'arrêtèrent au premier ordre de Drouet et de ses complices, et Louis XVI, pour qui ce pas devait être si décisif, cédant à cette confiante et généreuse résignation que lui inspirait toujours la pureté de ses intentions, se laissa conduire paisiblement à la maison du sieur Sauce, procureur de la commune, où il fut détenu prisonnier, quoiqu'il s'y fit bientôt reconnaître. Presque aussitôt le détachement de hussards fut réuni; mais M. Rohrig, qui le commandait, et qui jusqu'à ce moment avait ignoré qu'il dût attendre le roi, au lieu de faire quelque effort quand il en eut connaissance, ou du moins de rester à son poste où il eût pu maintenir sa troupe, l'abandonna à un maréchal-des-logis qui la mit en désordre, et vint, avec un empressement trop répréhensible, annoncer cette affreuse nouvelle à M. de Bouillé.

Cependant le chevalier de Bouillé et le comte de Raigecourt, instruits de l'arrestation du roi, mais ne doutant point qu'il ne fût bientôt délivré par les troupes, tant de l'intérieur que du dehors, jugèrent ne devoir songer qu'à sauver le relais, dont la direction leur était confiée, afin qu'il ne pût occasioner aucun retard lorsque Sa Majesté serait parvenue à passer la ville, et ils le placèrent sur la grande route, à quelque distance de l'auberge. Ils

ne purent néanmoins exécuter cette disposition qu'en abandonnant deux chevaux et un postillon qui furent arrêtés par le peuple déjà rassemblé autour de la maison, et en essuyant eux-mêmes quelques coups de fusil. Après avoir attendu près de vingt minutes dans cette position, ces deux officiers, assurés qu'il n'y avait plus d'espoir que le roi fût dégagé par les troupes qui étaient le plus proches de lui et sur lesquelles ils avaient compté, pensèrent, avec raison, n'avoir plus un moment à perdre pour aller prévenir le général et chercher près de lui les secours devenus nécessaires, d'autant plus que la distance, l'obscurité de la nuit, la difficulté du chemin présentaient assez de causes naturelles de retard. Il était plus de minuit et demi lorsqu'ils partirent.

La conduite de ces deux officiers a été le sujet d'une censure trop amère (1) contre eux et même

(1) C'est à mon frère plus qu'à moi à expliquer ce qui l'a concerné dans le poste de Varennes qui lui a été confié. Son séjour dans les îles depuis plus de vingt-cinq ans l'éloigne trop pour qu'il soit à même de détruire par lui-même les inculpations dont on a pris soin de le rendre l'objet, et je ne saurais présumer quelle réponse il jugera devoir faire à M. de Choiseul lorsqu'il connaîtra sa Relation. Je ne puis que me borner à offrir ici les réflexions que j'avais écrites dans le temps pour mes souvenirs particuliers, et que je n'aurais jamais présentées au public sans la circonstance imprévue qui m'y force.

M. le marquis de Raigecourt, pair de France, ayant bien voulu me communiquer le rapport de M. le comte de Raige

contre le général qui les a employés, pour que je ne m'y arrête pas. Je dois faire voir combien le jugement qu'on en a porté a été injuste ; combien surtout il a été inspiré par les rapports de personnes intéressées à aggraver les moindres fautes des autres, et qui, en cherchant à jeter du blâme sur M. de Bouillé dans la personne d'un de ses fils (1), se sont prévalues de la disposition du public à exercer de préférence sa sévérité contre celui qui agit en chef. J'ai déjà montré le peu de fondement comme le peu de vraisemblance du reproche d'ambition fait au sujet de la mission de ce fils. Un autre, non moins répété, a porté sur son âge et sur celui de M. de Raigecourt qui lui était adjoint. Mais comment supposer que deux jeunes officiers, dont le dernier avait plus de vingt-cinq ans, et qui tous deux étaient depuis long-temps capitaines

court, son frère, employé avec le mien à Varennes, cette pièce intéressante a été, selon son désir, placée dans le même volume que mon Mémoire. On y trouvera des explications suffisantes sur la conduite si mal jugée jusqu'ici de ces deux officiers. M. de Raigecourt n'est pas entré dans autant de détails que mon frère sur la conversation de Léonard, parce qu'elle ne s'adressait pas directement à lui, et que même elle eut lieu, en grande partie, hors de sa présence; mais on verra qu'ils s'accordent tous deux sur le fond, et l'on jugera, par le trouble des idées de cet individu, combien il était au moins singulier de l'avoir mis dans un tel secret.

(1) Voyez au reste aux pièces (no 15) la réponse de M. le duc de Choiseul au comte Jules de Bouillé.

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dans l'armée, ne fussent pas propres à attendre, près d'un relais disposé d'avance, le courrier qui devait les avertir de l'arrivée du roi, et à le diriger en conséquence? Comment penser qu'ils seraient dans le cas de parer à aucun accident sur un point où tout semblait prévu, qui était en dehors de la route ordinaire, dont la population était si faible, et où trois cents chevaux environ devaient se réunir à la suite de Leurs Majestés, si les troupes eussent été fidèles et si chacun eût fait ce qui lui était prescrit, double hypothèse qu'on devait admettre? Ce poste devait paraître et parut si peu important à M. de Bouillé, que, quoiqu'il me fût destiné depuis long-temps, il désira que j'y renonçasse, ainsi que je l'ai dit, pour me garder auprès de lui où il me croyait plus utile. Si donc lé général ne pouvait ni prévoir les conséquences de cette mission, ni regarder ces officiers comme y étant inférieurs, leur conduite n'a-t-elle pas répondu aux instructions qu'ils avaient reçues et à la confiance qui leur était accordée ? N'étaient-ils pas dans l'auberge près dú relais qu'ils tenaient préparé, lorsque le roi est arrivé à Varennes? N'ont-ils pas dû laisser ce relais où il avait été placé sur l'indication de M. de Goguelat, et où celui-ci, ainsi que le courrier, devait venir directement ? S'ils ne l'ont pas trouvé à l'entrée de Varennes, du côté de Clermont, n'est-ce pas la faute de cet officier qui n'avait pas suivi l'instruction qui lui avait été donnée à cet effet? Si, comme il leur était re

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