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MAZANIELLO. V. MASANIELLO. MAZARIN (JULES), fils de Pierre Mazarini, noble sicilien, naquit le 14 juillet 1602, à Rome (1), selon quelques-uns, mais plus probablement à Piscina, dans l'Abbruzze: il fit ses études dans la capitale du moude chrétien, et passa en Espagne, à l'âge de dix-sept ans, avec l'abbé, depuis cardinal, Jérôme Colonne. Pendant trois ans, il suivit dans ce royaume les cours de droit aux universités d'Alcalà et de Salamanque. Il était de retour à Rome, quand les jésuites, dans une fête qu'ils célébraient à l'occasion de la canonisation de leur fondateur (1622), voulurent faire représenter une tragedie. La vie du nouveau saint fournit le sujet de la pièce. Mazarin, élève des jésuites, fut choisi pour remplir le role de Loyola, et il y réussit parfaitement. Bientôt il abandonna la jurisprudence pour embrasser la carrière militaire, et il fut envoyé en 1625, avec le grade de capitaine dans la Valteline, où le pape avait une arinée. Il commença dès-lors à déployer son talent pour la négociation. Les généraux de S.S., Conti et Bagni, l'envoyèrent successi

(1) Les lettres de naturalisation données à Mazarin, en 1639, portent qu'il était né à Rome.

XXVIII.

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vement auprès du duc de Feria, géné ral des Espagnols, et auprès du marquis de Coeuvres (depuis maréchal d'Estrées), qui commandait les troupes françaises. L'adresse avec laquelle il remplit ces missions lui mérita les éloges de ses chefs. Cette guerre ayant cessé, il revint à Ro me, où il reprit l'étude de la juris prudence jusqu'à la guerre de la succession des duchés de Mantoue et de Montferrat, qui le fit rentrer dans la carrière diplomatique, pour laquelle il était véritablement né. Deux concurrents réclamaient l'héritage du duc de Mantoue. Le duc de Nevers, qui y avait le plus de droit, était soutenu par la cour de France, où il s'était fixé; le duc de Guastalla, son compétiteur, obtint l'appui de l'empereur, du roi d'Espagne et du duc de Savoie. Le pape, voulant prévenir une guerre dont l'Italie allait être le theatre, envoya le cardinal Sacchetti à Turin, pour agir en faveur du duc de Nevers; et Mazarin, qui était attaché à ce prélat, partit de Rome avec lui le jour même où il avait pris le bonnet de docteur en droit. Ses talents furent bientôt appréciés par le cardinal, qui se reposa sur lui de tout le soin de la négociation. On eut peu d'égards à la médiation du pape; et la

I

guerre commença. Louis XIII, en personne, força le pas de Suze (mars 1629); ce qui contraignit le duc de Savoie de traiter avec lui et de se séparer des Espagnols. Sacchetti revint à Rome, laissant à Mazarin le titre d'internonce, et le pouvoir de maintenir le traité et d'achever la paix. Le cardinal Barberini, neveu du pape, envoyé par son oncle, en qualité de legat en Piémont, accorda à Mazarin la même confiance que Sacchetti. On vit alors un homme âgé de moins de trente ans, avec un titre de peu d'importance, s'entremettre avec les diverses puissances, traiter au nom des unes et des autres, et les amener à la paix. Il fit pour cela plusieurs voyages, dont l'un fut la source de sa fortune. Ce fut à Lyon qu'il vit Louis XIII (1630), et qu'il eut avec Richelieu un long entretien. Le cardinal conçut de lui la plus haute opinion (1); et sentant le besoin, pour la France, d'avoir en Italie un homme habile et dévoué, il parvint à gagner le jeune diplomate, qui depuis ce temps se montra ouvertement favorable aux intérêts de la France. Il revint en Italie, sans que sa mission eût cu aucun succès, et la guerre continua; mais le duc de Savoie, Victor Amédée, étant mort, son fils donna toute sa confiance à Mazarin, et celui-ci reprit aussitôt l'œuvre de la paix avec une nouvelle ardeur. Les Espagnols assiégeaient Casal, et les Français voulaient secourir la place: il agit auprès des chefs des deux armées, et les fit consentir à une trève de six semaines. Ce temps expiré, il demanda une prolongation que les Français refusèrent, en marchant au

(1) On rapporte que Richelieu, en sortant, dit qu'il venait de parler au plus grand homme d'état qu'il eût jamais vu.

combat (octobre 1630 ). Alors Ma7arin leur proposa un traité, auquel ils mirent les conditions les plus dures. Pour les engager à se relâcher, il leur expose l'etat formidable de l'armée espagnole : mais ne pouvant les persuader, il passe dans cette dernière armée, rapporte aux chefs les conditions des Français; et se servant encore du même moyen, il leur parle de la supériorité des Français et de leur ardent desir de combattre. Cette fois il réussit ; et le general espagnol consentit à tout. Aussitôt Mazarin pousse son cheval à toute bride entre les deux armées ; et sans être effrayé des balles qui sifflaient autour de lui, il crie en agitant son char peau : La paix, la paix. Les soldats le repoussent, en criant: Point de paix; mais il va trouver le maréchal de Schomberg, qui accepte le traité et fait poser les armes à ses troupes. Cette paix fut confirmée, l'année suivante, par le traité de Cherasco, que négocia Mazarin. Vers le même temps, il fit avoir à la France la ville de Piguerol, en persuadant au duc de Savoie qu'il serait dédommagé de ce sacrifice, et en trompant les Espagnols et les Impériaux, qui n'avaient evacué Casal et Mantoue, qu'à condition que la garnison française quitterait Pignerol. Elle n'en sortit point, par une ruse de Mazarin, qui la fit cacher, et joua ainsi les commissaires de l'Espagne et de l'empereur, venus pour visiter la ville. Une telle conduite excita contre lui toute la haine des Espagnols; mais elle lui mérita la reconnaissance de Louis XIII et de Richelieu. Ce ministre écrivit, de la part de son maître, au pape, pour le feliciter sur l'habileté de son négociateur. Dans une cour toute ecclésiastique, l'habit

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militaire ne pouvait procurer de grands succès; Mazarin le quitta (1632), et reçut aussitôt un bénéfice et une charge de référendaire des deur signatures dans la chancellerie (1). Richelieu donna des instructions à l'ambassadeur de France à Rome, afin d'obtenir pour Mazarin un emploi qui l'approchât de lui. En 1634, celui-ci fut nommé vice-légat d'Avignon; et avant même qu'il eût quitté Rome pour se rendre à son poste, ses vœux furent comblés: il eut ordre de se rendre à la cour de France, en qualité de nonce extraordinaire. Le but de cette mission était d'intercéder en faveur du duc de Lorraine, dépouillé de ses états par Louis XIII. Reçu avec la plus grande distinction par Richelieu, qui voulut le loger dans son palais, Mazarin ne négligea rien pour conserver les bonnes graces du roi et de son ministre; et il y réussit tellement, que Louis XIII promit de le nommer au cardinalat, s'il n'était pas prévenu par le pape. Les Espagnols avaient enlevé, en 1635, l'électeur de Trèves, protégé par la France. Ce fut le prétexte d'une guerre qui dura vingt-cinq ans. Mazarin, comme ministre de la cour de Rome, voulut s'occuper d'une affaire qui regardait un prélat: mais les Espagnols se souvinrent de sa conduite à Pignerol; et leurs intriques auprès du souverain pontife, le firent rappeler à Avignon: ils agirent même pour faire révoquer sa vice-legation; mais il les prévint, et craignant qu'on ne le laissât dans l'oubli à Avignon, il demanda son rappel, et retourna, en 1636, à Rome, où il soutint ouvertement les intérêts de la France. Ce fut lui que

(1) Cette récompense était peu proportionnée aux services qu'avait rendus Mazarin; mais les partisans Espagne le desservirent auprès du pape.

Richelieu chargea de demander à Urbain VIII le chapeau pour le fameux père Joseph. La mort de ce capucin mit fin à la négociation. Richelieu, qui perdait un ami fidèle, un utile confident, résolut de le remplacer en s'attachant Mazarin, qui Îui avait déjà donné tant de marques de dévouement; et il engagea Louis XIII à placer sur sa tête le chapeau de cardinal qui avait été donné au P. Joseph. Cette demande blessa Urbain VIII, qui, d'abord favorable à Mazarin, s'était laissé depuis influencer par ses nombreux ermemis. Mais Richelieu avait fait lui-même la demande, et il ne savait pas reculer. A dater de cette époque, Mazarin s'attacha irrévocablement à la France. Appelé par Richelieu, il quitta l'Italie au commencement de 1639, et se rendit auprès du cardinal. La guerre, qui depuis tant d'années désolait l'Europe, épuisait les puissances: toutes desiraient la paix. Le roi de Danemark, Christian IV, s'offrit comme médiateur entre elles; Hambourg fut assigné pour licu de réunion à leurs ambassadeurs. Louis XIII avait jeté les yeux sur Mazarin, pour l'envoyer à ce congrès: mais les troubles qui survinrent en Savoie, firent penser qu'il serait plus utile dans un pays qu'il connaissait; et on l'y envoya au commencement de 1640, avec le titre d'ambassadeur extraordinaire. Les succès du comte d'Harcourt, en Piémont, l'aidèrent beaucoup à conclure, au mois de décembre 1641, un traité entre la duchesse de Savoie et ses beaux-frères qui, soutenus par l'Espagne, lui disputaient la tutelle de son fils. Ce fut alors que Mazarin obtint le chapeau demandé pour lui depuis comination du 16 décembre 1641, long-temps; il fut compris dans la

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et il reçut la barette des mains de Louis XIII, le 25 février de l'année suivante. Les intrigues qui, après avoir poursuivi Richelieu pendant toute sa vie, prirent une nouvelle force vers sa fin, ne purent empêcher Mazarin de rester fidèle à son protecteur; et il lui fut surtout très-utile, lorsque la découverte de la conspiration de Cinq-Mars rétablit son crédit et son autorité (V. RICHELIEU). Ce ministre en mourant le recommanda vivement au roi ; et si Mazarin ne lui succéda pas dans son titre, il fut réellement le premier ministre de Louis XIII, puisqu'il eut la direction de toutes les affaires. Richelieu avait régné par la terreur; Mazarin n'étant pas d'un caractère à user de semblables moyens, aima mieux se faire des amis ce fut à sa demande qu'on mit hors de la Bastille les maréchaux de Bassompierre, de Vitri, et beaucoup d'autres victimes du dernier ministre. Il rappela plusieurs membres du parlement exilés, et contribua beaucoup à la réconciliation du duc d'Orléans avec le roi. Cependant la santé de Louis XIII s'affaiblissait tous les jours, et faisait prévoir sa mort prochaine. La cour, qu'agitait l'attente d'une régence, était divisée en deux partis, celui de la reine, et celui de Monsieur. Louis XIII, qu'on avait toujours isolé de sa famille en lui inspirant contre elle des préventions que souvent elle avait justifiées, n'aimait et n'estimait pas plus sa femme que son frère. Il avait déclaré Monsieur incapable de la régence. Après la réconciliation des deux frères, les partisans du prince tentèrent de faire révoquer cette déclaration. Mazarin, détesté de la reine, parce qu'il était une créature de Richelieu, avait embrassé la cause du duc d'Orléans; et cherchant à

adoucir le roi à son égard, il travaillait avec ardeur à lui faire obtenir la régence: mais il rencontra des obstacles insurmontables dans l'esprit de Louis XIII. Trop adroit pour soutenir long-temps un parti désespéré, il essaya de faire revenir la reine sur son compte, en lui offrant ses services; il fut reçu froidement: néanmoins il agit pour elle auprès du roi, espérant bien s'en faire un mérite par la suite; mais comme il n'était pas assuré d'en tirer un grand avantage, il appuya le projet présenté au monarque par Chavigni, qui tendait à limiter l'autorité de la reine et du duc d'Orléans, en leur donnant un conseil de régence, investi d'un grand pouvoir. Mazarin fut nommé membre de ce conseil (1), avec le titre de ministre d'état, comme tous ceux qui en faisaient partie. Il fut distingué des autres, en ce que, outre la présidence qui lui était donnée en l'absence du duc d'Orléans et du prince de Condé, le roi mourant enjoignait à la reine de régler les affaires ecclésiastiques avec le conseil du seul cardinal. Deux jours après cette déclaration (21 avril), le monarque accorda une nouvelle faveur à Mazarin, en le choisissant pour tenir sur les fonts de baptême le Dauphin, depuis Louis XIV (2). Louis XIII termina, le 14 mai 1643, sa triste existence. Mazarin prévoyant bientôt que la reine at taquerait de toutes ses forces la déclaration du 19 avril, prit le parti de se démettre du pouvoir que

lui

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avait donné le feu roi (1), et publia sa résolution de retourner à Rome; mais ne comptant l'accomplir qu'au tant qu'il ne pourrait plus rester en France, il mit en jeu tous les ressorts afin de se faire retenir. Ses amis représentèrent qu'il n'avait jamais montré contre la reine la haine de Richelieu; que d'ailleurs, il était, avec Chavigni, le seul dépositaire du secret de l'État. Ce dernier argument prévalut; et Anne d'Autriche consentit à profiter au moins pour un temps des avis du cardinal. Mazarin, conservé par nécessité, eut le talent de se rendre agréable. La reine avait accordé toute sa confiance à l'évêque de Beauvais, Potier, son grand-anmónier, doué des vertus de son état, mais incapable de porter le poids des affaires (2). Elle se vit bientôt obligée de l'éloigner. Mazarin avait beaucoup gagné dans l'esprit de cette princesse; elle conçut le projet de lui donner la place de l'évêque de Beauvais. Naturellement indolente, elle trouvait dans le cardinal un ministre plein d'activité et de connaissances: d'ailleurs il était étranger, et elle se flattait de conserver toujours l'autorité, parce que son ministre n'aurait qu'cile pour appui. Le duc d'Orléans et le prince de Condé achevèrent de la décider. Mazarin s'était

(Tous les conseillers de régence, à l'exemple de Mazarin, frrent à la reine leur demission. Elle aurait pu se dispenser de s'adr sser au parlement pour se fire donner la regence pure et simple. C'était reconnaitre à ce corps un droit qu'il n'avait pas, auquel l'aurait pot pretendu, parce qu'il ne l'avait exerce qu'une fois à la mort de Henri IV), et presque malgré lui: c'etait encourag r des prétentions que par la suite on corbattit, et justifie l'orgueil d'un corps qui s'appelait alors le tuteur des rois.

(2) On dit que la première démarche du vieil évêque dans son ministère, fut de demander aux Hollandais de se couvertir à la religion ca holique, s'ils voulaient conserver l'amitié de la France. Voltaire rejette absolument cette anecdote, rapportée par Retzt la Châtre, sans autre intérêt que celui de la

D'ailleurs, plusieurs autres actions avérées de l'évêque de Beauvais, la rendent très-croyable.

assuré les bonnes grâces du premier
de ces deux princes, depuis qu'il lui
avait prouve son dévouement à l'oc-
casion de la régence; et il avait mis
Condé dans ses intérêts, en faisant
donner le commandement des ar-
mées au duc d'Enghien, dont la jeu-
nesse avait long-temps inspiré de la
défiance à Louis XIII. La reine, dont
le pouvoir se trouva bientôt af-
fermi, ne tarda pas à écarter ses
anciens ennemis, que les circonstan-
ces l'avaient d'abord forcée de mé-
nager. Les finances furent ôtées à
Bouthillier, et la charge de secrétaire-
d'état à Chavigni, son fils. Mazarin,
ami de ce dernier, lui conserva une
place dans le conseil; mais on croit
qu'il ne fit pas de grands efforts pour
désarmer à son égard la haine de la
régente, parce qu'il craignait ses ta-
lents et son habileté. Dans le même
temps, l'ancien garde - des- sceaux,
Châteauneuf, emprisonné par Riche-
lieu (1633), fut mis en liberté. Maza-
rin redoutait ce personnage, sou-
tenu par la faveur de la reine, qu'il
devait à des persécutions endurées
pour elle. Il réussit à lui faire or-
donner de rester dans sa maison
de Mont-Rouge, sans rentrer dans
Paris. Le cardinal devenait de plus
en plus agréable à la reine par sa
connaissance des affaires et par son
activité; et il se faisait également
aimer du public par les gràces qu'il
répandait, par son adroite modestie
et par sa politesse. Cependant l'évê-
que de Beauvais était encore à la
cour; mais la reine lui avait retiré
sa confiance: il ne lui restait que
l'ombre de l'autorité, et la houte de
s'être montré incapable de la retenir
(1). Mazarin, en remplaçant ce pré-

(1) Il est difficile d'adopter l'opinion de Voltaire, qu'il est très vraisemblable que Mazarin etait miuistre designé dans l'esprit de la reine, du vivant mùmo

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