Imatges de pàgina
PDF
EPUB

à laquelle seule on auroit reconnu La Fontaine: « Je sors pour aller un peu à l'Académie, afin « que cela m'amuse. » Il règne dans ce billet un tel mélange de fermeté philosophique, d'humilité chrétienne et de crainte religieuse, joint aux sentiments d'une amitié si vraie et si tendre, qu'il suffiroit seul pour prouver combien La Fontaine étoit sincère dans sa foi et dans sa piété, et que l'âge ne lui avoit rien fait perdre de la bonté et de la sensibilité de son cœur.

De Maucroix, dans la réponse qu'il fit aussitôt (elle est datée du 14 février), après quelques touchantes et pieuses exhortations, dit à son

ami :

« Si Dieu te fait la grace de te renvoyer la santé, j'espère que tu viendras passer avec moi les restes de ta vie, et souvent nous parlerons ensemble des miséricordes de Dieu. Cependant, si tu n'as pas la force de m'écrire, prie M. Racine de me rendre cet office de charité, le plus grand qu'il me puisse jamais rendre. Adieu, mon bon, mon ancien et mon véritable ami. Que Dieu, par sa très grande bonté, prenne soin de la santé de ton corps, et de celle de ton ame!»

De Maucroix, dans les OEuvres de La Fontaine, Lettres à divers, 35, t. VI.

p. 629.

Ainsi Racine, qui, dans sa jeunesse, fut si souvent dans de joyeux banquets le compagnon de La Fontaine, se trouvoit encore près de lui à l'approche de ses derniers moments; et la religion, qui inspiroit à tous deux et les mêmes sentiments et les mêmes espérances, resserroit les nœuds de cette longue et touchante amitié.

La Fontaine n'avoit pas en vain pressenti sa fin prochaine. On prétend qu'elle fut avancée par l'usage indiscret d'une tisane rafraîchissante qu'il prit pour se guérir d'un grand échauffement causé par les remèdes qu'on lui avoit administrés pendant sa maladie : quoiqu'il en soit, ses forces diminuèrent rapidement, et il mourut dans l'hôtel de son ami, M. d'Hervart, le 13 avril 1695, âgé de soixante et treize ans neuf mois et cinq jours. Il fut inhumé dans le cimetière des Saints-Innocents, et non dans celui de Saint-Joseph, comme l'ont dit à tort tous ses biographes depuis d'Olivet2.

[ocr errors]

Voyez ci-après les Pièces justificatives, p. 584, note 2; Mercure galant, avril 1695; Perrault, Hommes illustres, 1696, in-fol., p. 84; Dangeau, Nouveaux Mémeires dans l'Essai sur la monarchie de Louis XIV, p. 95, à la date du 17 avril; Mathieu Marais, Histoire de la vie et des ouvrages de La Fontaine, p. 120 de l'édit. in-12, et p. 156 de l'édit. in-18; Pouget, dans les OEuvres de La Fontaine, 1729, édit. in-8, t. I, p. xxvi.

Il s'est trompé aussi sur la date de la mort de La Fontaine et sur le nom de son père. Conférez les OEuvres posthumes de M. de Maucroix, p. 348; l'Histoire de l'académie françoise, t. II, in-4°, p. 277; Titon du Tillet, Parnasse françois, in-folio, p. 460; Niceron, Mémoires pour servir à l'histoire des hommes illustres. t. XVIII, p. 328; Chauffepié, Dictionnaire, t. II, p. 70 de la lettre F; La Borde,

Quand Fénélon, qui, depuis deux ans, étoit le collègue de La Fontaine à l'Académie françoise 1, eut appris qu'il avoit cessé d'exister, il traça de ce grand poëte un éloge en langue latine, et le donna à traduire au duc de Bourgogne, afin d'attacher un intérêt puissant à un exercice d'étude, et aussi pour faire bien comprendre à l'enfant royal toute l'étendue de la perte que la France et les Lettres venoient de faire, dans la personne de ce bon vieillard que ce prince affectionnoit, auquel il donnoit tout ce qu'il pouvoit donner, et qui amusoit son jeune âge par des récits en apparence si sim ples et si faciles.

«La Fontaine n'est plus (dit Fénélon, dans cet écrit)! il n'est plus! et avec lui ont disparu les jeux badins, les ris folâtres, les graces naïves et les doctes Muses. Pleurez, vous tous qui avez

Essai sur la musique ancienne et moderne, in-4°, t. IV, p. 252. Tous ces auteurs, ainsi que Montenault, Fréron, et beaucoup d'autres, dans leurs notices sur notre poete, ont copié les erreurs de d'Olivet. Pour les rectifier, conférez Walck., 1" édit., p. 500 à 506, notes 102 et 103; 2° édit., t. II, p. 301, note 1; Germain Brice, Description nouvelle de Paris, édit, de 1698, qui, à l'article du cimetière de SaintJoseph, t. I, p. 224, fait mention de la sépulture de Molière, et ne dit rien de celle de La Fontaine; et enfin M. Le Noir, qui, en imprimant dans le t. VIII, p. 161 du Musée des monuments françois, quelques-uns des procès-verbaux dont nous n'avions cité que des extraits, a achevé, sans s'en douter, de dévoiler les niaises impostures des autorités révolutionnaires qui, en 1792, donnèrent à une des sections de Paris le nom de Section armée de Molière et de La Fontaine.

1 Fénélon prononça son discours de réception à l'Académie, le 31 mars 1693: voyez Recueil de harangues, 1698, in-4°, p. 620. La Fontaine fut remplacé dans cette compagnie par l'abbé Clérambault, qui prononça son discours de réception le 3 juin 1695.

reçu du ciel un cœur et un esprit capables de sentir tous les charmes d'une poésie élégante, naturelle et sans apprêt il n'est plus cet homme, à qui il a été donné de rendre la négligence même de l'art préférable à son poli le plus brillant! Pleurez donc, nourrissons des Muses; ou plutôt, nourrissons des Muses, consolez-vous: La Fontaine vit tout entier, et vivra éternellement dans ses immortels écrits. Par l'ordre des temps, il appartient aux siècles modernes, mais par son génie, il appartient à l'antiquité, qu'il nous retrace dans tout ce qu'elle a d'excellent. Lisez-le, et dites si Anacréon a su badiner avec plus de grace; si Horace a paré la philosophie et la morale d'ornements poétiques plus variés et plus attrayants; si Térence a peint les mœurs des hommes avec plus de naturel et de vérité; si Virgile enfin a été plus touchant et plus harmonieux 1. »

I Adry, préface du Télémaque, édit. 1811, in-8°; De Beausset, Histoire de Fénélen. t. I, p. 510 de la 1° édit., ou note b des Pièces justificatives du liv. 1. Dans la 3° édit. de cet ouvrage, t. I, p. 378, l'illustre auteur a tronqué à dessein cette citation. Conférez Walck., 1" édit., p. 505, note 105.

FIN DU SIXIÈME ET DERNIER LIVRE.

JUSTIFICATIVES.

I.

VOYEZ pages 3-7-15-54-109-219-580.

GÉNÉALOGIE DE LA FONTAINE

ET DE SES DESCENDANTS.

J'ai dressé la généalogie suivante de notre poëte et de ses descendants, d'après des actes authentiques, conservés dans les papiers de ses descendants directs, ou dans les études des notaires, et les dépôts publics des villes de Château-Thierry, de Pamiers et de Paris. J'ai moi-méme tiré des copies de plusieurs de ces actes, et je me suis procuré des copies de plusieurs autres, certifiées légalement.

PIERRE DE LA FONTAINE, marchand drapier à ChâteauThierry, a eu pour fils:

PIERRE DE LA FONTAINE, qui eut de MARTINE Josse, son épouse, NICOLAS DE LA FONTAINE, qui suit; et Jean de La Fontaine', Barbe de La Fontaine', Marie de La Fontaine3, et Louis de La Fontaine. (Voyez l'acte de partage de 1573.)

1 De Jean de La Fontaine sont issus Claude de La Fontaine et Edmond de La Fontaine qui paroissent n'avoir point eu de postérité.

Barbe de La Fontaine, baptisée le 12 novembre 1448, épousa Jacques de Nelle, et tous deux ont été enterrés aux Cordeliers, à Château-Thierry; ils paroissent être morts sans postérité.

3 Marie de La Fontaine paroit être morte sans postérité.

4 Louis de La Fontaine fut marié à Etiennette Oudan, dont il eut François de La Fontaine, conseiller au grenier à sel, marié à Colard, et mort en 1600. Celui-ci eut pour fils Louis de La Fontaine, qui épousa Madeleine Petit et donna le jour à François de La Fontaine, avocat, marié à Marie Le Gevre; de ces derniers est issu Crépin de La Fontaine, procureur du roi, marié à MarieMarguerite Lefebvre, dont il eut Robert de La Fontaine marié à Anne-Catherine Despaubourg; ce Robert eut au moins trois enfants, savoir: 1° Pierre Crépin Robert de La Fontaine, maistre des eaux et forêts, bailli de La Fère;

« AnteriorContinua »