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cuter. Il avoit représenté sur la voûte du cabinet l'apothéose de Psyché: on la voyoit s'élever sur le sommet de l'Olympe, portée par Mercure et par Hyménée; Jupiter paroissoit empressé de recevoir la divinité qui venoit embellir son empire; une troupe d'Amours servoient de cortège à leur nouvelle souveraine. Sur la voûte du salon, Mignard avoit peint les principales aventures d'Apollon, sa cruelle vengeance envers Niobé, le combat contre le serpent Python, son séjour à la cour du roi Laomedon, la douleur dont il avoit été accablé par la perte du beau Hyacinthe, son amour pour la sévère Daphné, et le soin qu'il prenoit d'arroser l'arbre que la métamorphose de cette nymphe lui avoit rendu si cher. Sur la coupole on le voyoit dans toute sa gloire, occupé à instruire les Muses attentives. Cette fresque étoit considérée comme le chef-d'oeuvre de Mignard'. Ce grand peintre étoit intimement lié avec La Fontaine, ainsi que lui « homme de Champagne2,»

De Monville, Vie de Mignard, p. 87 à 89; Le Maire, Paris ancien et nouveau, 3 vol., in-12, p. 301. Ces fresques existoient encore en 1752; voyez Lepicié, Fies des premiers peintres du roi depuis M. Le Brun jusqu'à présent, Paris, 1752, in-12, p. 142; Germain Brice, Description nouvelle de la ville de Paris, 1698, in-12, t. I, p. 214. L'histoire de Psyché se trouvoit aussi peinte à fresque sur le plafond du salon de Ninon de Lenclos dans la rue des Tournelles; Mémoires et lettres pour servir à l'histoire de mademoiselle de Lenclos, Rotterdam, in-12, p. 28; Bret, Mémoires sur la vie de mademoiselle de Lenclos, Amsterdam, 1751, in-12, p. 142.

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pit La Fontaine, en parlant de lui-même dans l'épître à une abbesse, t. VI, p. 55.

et encore plus avec Molière; il fut même, dans le temps, admis aux petites réunions de ces deux poëtes avec Racine, Boileau et Chapelle'. Molière fit un poëme exprès pour célébrer la fresque du Val-de-Grace', et le roman de Psyché, qu'avoit composé La Fontaine, contribua aussi à la célébrité des peintures que Mignard exécuta dans le cabinet de l'hôtel d'Hervart. C'est dans cet hôtel, qui étoit situé rue Plâtrière, à l'endroit où est actuellement l'administration des postes, que La Fontaine devoit terminer sa vie 3.

Le goût que La Fontaine avoit pour les beaux arts l'avoit lié d'amitié avec plusieurs artistes; il prenoit intérêt à leur sort: c'est ainsi qu'il s'efforça, par ses conseils, de mettre un terme aux débauches de Raimond de La Fage, dessinateur et graveur, dont tout le monde admiroit le talent, mais qui, par suite de son inconduite, mourut dans la force de l'âge, en 1684. Lorsque Van der Bruggen publia, cinq ans après, l'œu

De Monville, Vie de Mignard, p. 93.

2 Ibid., p. 93 et 191.

3 Jaillot, Recherches sur Paris, t. II; Quartier Saint-Eustache, p. 42; De Monville, Vie de Mignard, p. 88 en note; Menagiana, t. III, p. 351; Germain Brice Description de la ville de Paris, 1752, in-12, t. I, p. 471 et 474; Lepicié, Vies des premiers peintres du roi, 1752, p. 127 à 138; Le Maire, Paris ancien et nouveau, t. III, p. 301. Ce dernier nous apprend que les grouppes de figures qui ornoient les encognures du cabinet de M. d'Hervart peint par Miguard, avoient été exécutées par le sculpteur Anguiere.

vre de La Fage1, avec le portrait de cet artiste, et celui de M. Bertin, trésorier de la chancellerie de France, qui avoit fait la dépense de cet ouvrage, notre poëte composa les vers qui furent gravés au bas de ces deux portraits 2.

La Fontaine fut aussi lié avec plusieurs ecclésiastiques recommandables. Le jésuite Commire lui sut gré d'avoir imité plusieurs de ses fables, et composa des vers latins à sa louange pour lui témoigner sa reconnoissance3. Nous avons déja fait mention de Huet, son ami particulier, qu'on nomma sous-précepteur du dauphin, puis évêque de Soissons, et ensuite évêque d'Avranches, homme remarquable par sa prodigieuse érudition, et cependant exempt de pédanterie, pieux, mais sans ferveur, passionné pour la poésie, d'un caractère égal et prévenant, loyal et franc 4. Notre poëte avoit eu des liaisons encore plus intimes avec l'abbé Le Camus, qui d'abord s'étoit montré galant, aimable, libertin, et même impie. L'exemple de Bouthillier de Rancé, fondateur de la Trappe, qui, dans sa

Recueil des meilleurs dessins de Raymond de La Fage, gravés par cinq des plus habiles graveurs, et mis en lumière par les soins de Van der Bruggen, 1689, in-fol. 2 La Fontaine, Vers pour des portraits, t. VI, p. 299 et 300.

3 J. Commitii, e societate Jesu, Opera posthuma, 1704, Parisiis, p. 211.

4 Pet. Dan. Huetii E. A., Commentarius de rebus ad eum pertinentibus, 1718,' in-12, p. 271, 362, 366 et 371; d'Olivet, Notice sur Huet on tête du Huetiana 1722. in-12, p. 15; Walck., 1" édit., p. 456.

première jeunesse, avoit mené aussi une vie assez déréglée, convertit l'abbé Le Camus. On lui donna l'évêché de Grenoble, et ensuite le chapeau de cardinal'. La Fontaine fait indirectement allusion à la conduite passée et à la vie présente de ce prélat, dans quelques vers qu'il écrivit au bas d'une lettre que lui avoit adressée M. Girin, contrôleur des finances à Grenoble, pour le rendre juge d'une gageure faite au sujet d'une difficulté grammaticale', qui s'étoit élevée sur le refrain d'un rondeau. Notre poëte, après avoir exposé fort clairement les raisons de sa décision, en vers jolis et faciles, ajoute:

Je ne me donne point ici pour un oracle;
Et sans chercher si loin, Grenoble en possède un:
Il sait notre langue à miracle;

Son esprit est en tout au-dessus du commun.
C'est votre cardinal que j'entends: ses lumières
Dédaignent, il est vrai, de semblables matières.

Ballades et rondeaux, ce n'est point son affaire.
A l'égard du salut, unique nécessaire,

Il n'est point de difficulté

Qui ne doive occuper en pareille occurrence,

1 Dangeđu, Nouveaux mémoires, à la date du 11 septembre 1686, dans l'Essai sur l'établissement monarchique de Louis XIV, par Lemontey, p. 23; De Subligny, Muse dauphine, à la date du 19 août 1666, p. 112; OEuvres de La Fontaine, 1823, in-8°, t. VI, p. 173, note 1.

2 Tallemant, Remarques et décisions de l'Académie, 1698, in-12; Boileau, t. IV, p. 309, lettre 93.

Non seulement son éminence,

Mais même encor sa sainteté1.

Mais de tous ceux que La Fontaine fréquentoit, Racine étoit, après de Maucroix, celui qu'il chérissoit le plus, et qui avoit pour lui l'amitié la plus tendre et la plus sincère. Racine auroit voulu corriger notre poëte de ses défauts, et l'exhortoit surtout à prendre plus de soin de ses affaires. C'est probablement dans ce but que La Fontaine s'étoit déterminé à se rendre à Château-Thierry en 1686. Racine, ne recevant pas de ses nouvelles, s'en plaignit; et La Fontaine lui écrivit : « Poi<< gnant, à son retour de Paris, m'a dit que vous preniez mon silence en fort mauvaise part: « d'autant plus qu'on vous avoit assuré que je << travaillois sans cesse depuis que je suis à Château-Thierry, et qu'au lieu de m'appliquer à

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<«< mes affaires, je n'avois que des vers en tête. Il n'y a de tout cela que la moitié de vrai : mes << affaires m'occupent autant qu'elles en sont di«gnes, c'est-à-dire nullement; mais le loisir « qu'elles me laissent, ce n'est pas la poésie, «< c'est la paresse qui l'emporte. » Il rapporte aussi à son ami une chanson qu'il a faite en réponse à un couplet que lui avoit adressé une petite fille de huit ans : « c'a été là, ajoute-t-il, ma

La Fontaine, Épitres, 25, t. VI, p. 173.

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