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l'Æsis (Esino); Polybe le premier y ajoute la Vénétie et la Gaule cisalpine. Mais cette dénomination géographique n'acquit de la réalité qu'à l'époque où Auguste, Marc-Antoine et Lépidus voulurent empêcher que la Cisalpine ne fût gouvernée par un proconsul, qui aurait pu, comme César, amener sans obstacles une armée aux portes de Rome. Auguste divisa plus tard l'Italie en onze régions, en y comprenant aussi l'Illyrie (1). Elle resta ainsi jusqu'à la chute de l'empire. Alors le nom d'Italie fut donné seulement à cette partie septentrionale qui reçut de nos jours celui de royaume d'Italie, à l'exclusion de la Toscane, de Rome, et des contrées où précisément ce nom avait pris naissance. Puis cette ombre de royaume s'évanouit à son tour, et le nom n'existe plus que dans les souvenirs et les espérances.

Les anciens assignaient à la Gaule la partie supérieure de l'Italie; les Ligures se livraient à de rudes travaux sur les roches escarpées du golfe de Gênes; les Vénètes, aux lieux où devait plus tard dominer la superbe épouse, aujourd'hui la veuve des mers.

On descendait des plaines fertiles de la Gaule cisalpine dans de vastes marais (2), devenus plus tard les riantes campagnes de Parme et de Modène. Des eaux stagnantes et des marécages infectaient aussi le territoire de Brescia, de Mantoue, de Côme, de Reggio, de même que la contrée qui s'étend entre Altino et Aquilée (3); Ravenne s'élevait au milieu des lagunes (4). On allait chercher des marbres au port de Luni : le glaive inexorable avait détruit l'antique civilisation de l'Étrurie; le sol asservi des Sabins et des Ombriens nourrissait de nombreux troupeaux. Des routes magnifiques conduisaient dans la Campanie, où Pouzzoles attirait le commerce de toute la Méditerranée; et Naples, que le Vésuve ne menaçait pas encore, charmait par ses mœurs grecques les loisirs des vainqueurs du monde. Le Samnium avait été dépeuplé par les victoires de Sylla; la Lucanie, le Brutium (Calabre), l'Apulie,

(1) 1. Le Latium et la Campanie,; 2. le pays des Picentins et des Hirpins; 3. la Lucanie, le Brutium et l'Apulie, avec les Salentins; 4. le pays des Férentins, des Marrucins, des Péligniens, des Marses, des Vestins, des Samnites et des Sabins; 5. le Picenum; 6. l'Ombrie ; 7. l'Étrurie; 8. la Cisalpine; 9. la Ligurie; 10. la Vénétie et l'Istrie, avec les Carnes et les Japygiens; 11. la Gaule transpadane.

(2) CICERON, Lettres familières, X.
(3) VITRUVE, I, 4. STRABON, V.
(4) SIDOINE APOLLINAIRE, I, 8.

Germanie.

avaient greffé la nouvelle civilisation sur l'ancienne; et Brindes, où l'on allait d'ordinaire s'embarquer pour la Grèce, était l'honneur des colonies helléniques. L'Italie entière passait pour contenir onze cent quatre-vingt-dix sept villes.

La fertile Sicile, l'aride Sardaigne, la sauvage Cyrnus, où Sénèque exilé (1) trouvait encore des vestiges du langage ibérique, et à laquelle les Celtes apportèrent plus tard le nom de Corse (2), l'île d'Elbe surtout, avec ses mines de fer, participaient aux vicissitudes de la terre de Janus, autour de laquelle elles se groupaient.

Strabon, comme nous l'avons dit, fait de l'Elbe la limite septentrionale de l'Europe; en deçà de ce fleuve il place les Germains, qu'il distribue plus confusément que Pline et Tacite. Mais, indépendamment de ce que les Romains n'étaient pas extrêmement soigneux d'explorer la vérité, ni très-attentifs à la discuter, comme les pays étaient nommés d'après les peuples qui s'y trouvaient, il arrive parfois qu'une contrée change de situation d'un géographe ou d'un historien à l'autre, parce que le nom de ses habitants a changé.

Les anciens désignaient sous la dénomination vague de Germanie le pays, peu connu d'eux, situé entre le Rhin, le Danube, la Teiss, la Vistule, la Baltique et la mer du Nord, en y comprenant aussi la Scandinavie et la Chersonèse cimbrique. Les armées romaines avaient reconnu le véritable cours du Danube en Germanie et en Pannonie; aussi ne le faisait-on plus venir, comme au temps d'Aristote, de l'Istrie en ligne droite. On avait des notions précises sur le pays au nord de ce fleuve jusqu'à la Vistule et à la Baltique. On croyait que cette mer appelée sinus Sarmaticus était un golfe de l'Océan, qu'au milieu de ce golfe étaient situées les îles de Scandinavie comme aussi la Thulé de Pythéas, et qu'il rejoignait les mers Scythique et Sérique, avec lesquelles la mer Caspienne était supposée communiquer.

La Scandinavie (Thiuland), déjà visitée par Pythéas (3), qui pénétra jusqu'à la Baltique, passait, près de ceux qui en admettaient l'existence, pour un archipel de grandes îles, appendices du pays des Suèves ou de la Germanie orientale. Ils connaissaient les Kymris, qui recueillaient l'ambre dans la Chersonèse cimbrique (Jutland);

(1) Consol. ad Helv., c. 8.
(2) De cors, marais ou jonc.
(3) Voy. tome II, pag. 135.

les Svions (Suédois), puissants sur terre et sur mer, et gouvernés par des monarques absolus, tels que ces rois-pontifes successeurs d'Odin, dont parlent les Sagas de l'Islande; les Gottons ou Goths, qui conciliaient la liberté avec le gouvernement d'un seul; d'autres peuples encore, dont les institutions étaient plus stables et la civilisation plus avancée que celles des Germains. Ils plaçaient dans la Russie centrale les monts Riphées, toujours couverts de neige.

Déjà les Romains avaient éprouvé ce que pesaient les armes des Germains; et les Longobards, sur les bords de l'Elbe, paraissent avoir été le peuple le plus éloigné avec lequel leurs légions aient eu à se mesurer. Les marchands fréquentaient le grand État constitué par le marcoman Maroboduus dans la Bohême, la Silésie et les autres contrées voisines, enlevées à un prince goth. Vers l'embouchure de la Vistule on désignait nommément les Vénèdes, pillards farouches; et, en remontant ce fleuve, les Liges ou Lutes, peut-être les Lèches du moyen âge, ancêtres des Polonais, comme ceux des Russes furent les Roxolans ou Roxans et les Jazyges, qui étaient de race sarmate probablement. Les Bastarnes, habitants de la Pologne méridionale, formaient, selon Pline, un cinquième de la nation germanique.

On connut plus tard, au sud-ouest de la Lithuanie, les Finnois, qui dans le onzième siècle passèrent dans la Finlande. C'étaient des hommes tout à fait sauvages et repoussants; ils n'avaient ni armes, ni chevaux, ni même de huttes; ils se nourrissaient d'herbes, se couvraient de peaux, dormaient sur la terre, et se servaient de flèches dont un os formait la pointe. Ils déposaient le produit de leur chasse au milieu des branches entrelacées des arbres; c'était là aussi que les enfants reposaient, que mouraient les vieillards; tous préférant cette rude existence à l'esclavage des peuples policés, sans cesse ballottés entre la crainte et l'espérance. Bérébiste, roi des Gètes ou Daces, excitait par ses conquêtes la jalousie des Romains. Il arrêtait sur les rives du Borysthène les excursions des Sarmates, qui, à l'instigation de Mithridate, étaient venus des contrées entre le Caucase, le Tanaïs et la mer Caspienne, leur pays natal, pour combattre les Scythes, et qui, abandonnant leurs chars et la vie errante, s'étaient établis dans la Lithuanie et dans les régions voisines, où ils devinrent la souche de nations étrangères à la race slave. Quand de la Germanie et de la Dacie, unique province possédée

T. V.

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Germanie occidentale.

par les Romains au delà du Danube, on se dirige vers la mer Caspienne, on rencontre un pays de plaines immenses, d'où venaient des fourrures que les habitants échangeaient contre des vêtements et des vins. Tanaïs, sur le fleuve du même nom, avait été détruite par les rois du Bosphore, pour se relever dans le moyen âge; mais Oibia, sur le Borysthène, était vivifiée par le commerce.

Sur le rivage occidental de la Baltique habitaient les Esthyens, d'où sont descendus vraisemblablement les Esthoniens, qui portaient au cou l'image d'un sanglier, animal consacré à Freya. Ils s'occupaient à recueillir l'ambre, fort étonnés de le voir rechercher comme un objet de prix.

Dans la Germanie orientale, séparée des Romains par l'Elbe, étaient les Suèves, chasseurs et pâtres qui se battirent contre César, et qui, changeant de contrée chaque année, convertissaient en déserts les pays environnants. Quelques-uns d'entre eux, sous le nom de Sénones, occupaient cent districts entre l'Oder et l'Elbe, se réunissant chaque année pour un sacrifice humain dans une forêt où l'on n'entrait que les mains liées; d'autres, avec Maroboduus, s'étaient établis dans la Bohême. Il en fut enfin qui donnèrent leur nom à une partie de la Germanie (Souabe), ce qui indique peutêtre qu'il était collectif (1).

Au temps de Pline, les Vandales étaient le peuple le plus puissant parmi ceux qui résidaient entre la Vistule et l'Oder. Vers l'embouchure de ce dernier fleuve étaient les Goths, et vers la Warta et la Netze, les Burgondes, qui, appartenant sans doute à la même race, vivaient sous des rois amovibles (Hendios, Kindios) et sous des pontifes à vie (Sinistani). Les Rugiens ou Ruges devinrent célèbres dans leurs migrations, ainsi que les Varins (Warni).

Dans le Mecklenbourg et dans le Holstein, les Angles adoraient Herta, déesse scandinave de la terre, qui avait son temple dans une ile (Femern?), au milieu d'un lac où l'on jetait les esclaves qui avaient offert les sacrifices. Diverses tribus réunies formaient la confédération des Saxons, dont le nom est peut-être collectif.

Quant à la Germanie occidentale baignée par la mer, elle était, entre l'Elbe et l'Ems, le séjour des Chauces, qui, contraints par les marées de se réfugier sur de hautes collines ou dans des huttes

(1) Schweifer, vagabonds.

flottantes, n'ayant ni troupeaux, ni plantes, vivaient de poisson cuit à un feu de tourbe. Ils s'associèrent ensuite aux Saxons, et devinrent un des peuples les plus puissants et les mieux gouvernés de la confédération.

Le pays à partir de l'Ems jusqu'à l'embouchure la plus occidentale de la Meuse était occupé par les Frisons, qui avaient résisté à Tibère, mais qui avaient été vaincus par Claude. Derrière eux étaient les Bataves, colonie des Cattes entre les bouches du Rhin; ils étaient ménagés par les Romains, comme une réserve en cas de guerre. De l'Hartz au Rhin, et du midi de la Westphalie actuelle jusqu'à la Sâale en Franconie, habitaient les Bructères, les Camaves, les Sicambres, les Marses, les Chérusques, les Cattes, tous compris probablement sous le nom générique d'Istévons; ils étaient habituellement en guerre avec les Ingevons, nation septentrionale. Les deux dialectes entre lesquels l'Allemagne est encore partagée ont fait présumer que les Francs et les Saxons d'aujourd'hui ne sont autres que les descendants des peuples qui composaient ces deux ligues.

Vers le confluent du Rhin et du Mein, une foule de Gaulois avaient occupé des terres dont ils payaient la dîme (agri decumates); et diverses tribus éparses dans ces environs formèrent, sous Caracalla, la confédération des Alemans.

Le centre et l'orient de la Germanie demeurèrent inconnus. Seulement la grande nation des Hermundures se maintint amie des Romains; ils étaient admis à trafiquer dans les villes florissantes de la Vindélicie et de la Rhétie. Au nord de ce peuple étaient les Teuriochèmes (Thuringiens?); au sud-est, les Narisiens, qui, avec les Marcomans et les Quades habitants de la Bohême, de la Moravie et de l'Autriche actuelle, touchaient à la frontière de l'empire. La forêt Hercynia, nom sous lequel César confondit toutes celles de la Germanie centrale, s'étendait au nord de la Moravie, du côté de la Hongrie (1).

Dans la Chersonèse Taurique florissait, sous la protection de Rome, la ville libre de Chersonèse, près de Sébastopol, le royaume du Bosphore, avec Panticapée, colonie milésienne (Jenikale), et Théodosie (Capha).

Le long de la rive méridionale du Danube s'étend l'Illyrie,

(1) Nous parlerons plus en détail des peuples germains dans le liv. VII, ch. 1.

Illyries

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