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les renseignements recueillis par Hérodote à Memphis et à Cyrène. Avec les Carthaginois avait péri le souvenir des relations qu'ils entretenaient avec les peuples du Niger; et les navigations hardies d'Hannon étaient reléguées parmi les fables. Il semblerait, d'après ce que dit Pline, que les Romains ne connaissaient qu'un tiers de ce continent. Selon lui, Juba, roi de Mauritanie, avait exploré la source du Nil. Il la place dans une contrée de la Mauritanie intérieure, où bientôt ce fleuve, indigné de couler parmi des sables arides, se cache sous terre durant plusieurs journées de chemin. Il reparaît ensuite dans la Mauritanie Césarienne, et, après avoir vu les peuples qui habitent dans le voisinage, il se cache de nouveau durant vingt journées de chemin, jusqu'à l'instant où il atteint les confins de l'Éthiopie. Pline confond ainsi le Nil avec le Niger. L'inscription d'Adula (1) nous a indiqué une expédition faite dans l'intérieur du pays, mais qui peut-être se borne au pays entre le golfe Arabique et l'Astape (Abavai). Sous Auguste, Candace, reine d'Éthiopie, avait envahi la haute Égypte à la tête de soldats sans discipline, et n'ayant pour armes que de larges boucliers d'acier, des haches, des épieux et des sabres. Le préfet Petronius les avait repoussés et poursuivis à travers les déserts, où Cambyse avait péri. Mais à peine s'était-il retiré, que la fière amazone était revenue à la charge; puis, 24-21 avant se voyant assiégée, elle avait envoyé des ambassadeurs à Auguste, qui, peu désireux de conquérir des déserts inhabités, lui avait sans difficulté accordé la paix, en l'exemptant même du tribut qui lui avait été imposé.

J. C.

Au nombre des peuples de l'intérieur de l'Afrique, les Romains désignent nommément les Nasamons, les Gétules, en arrière du pays des Carthaginois et des Numides, et les Garamantes (Fezan), au delà du cours du soleil, aux extrémités du monde (2). L'imagination des anciens plaçait dans l'Éthiopie, comme ils appelaient la contrée entre les Garamantes et les cataractes du Nil, des tribus aux mœurs et aux noms les plus bizarres. C'étaient les Strutiophages, ou Mange-Autruches, les Acridophages (Mange-Sauterelles), les Panphages (Mange-Tout), les Troglodytes, habitant des cavernes ; c'étaient encore les Gamphasantes, aux bouches immenses, et les Blemmyes, aux regards terribles; les uns pygmées, les autres géants.

(1) Voy. tome III, page 46.
(2) Virgile.

Les fles Fortunées, nom fabuleux dans un temps, mais qui depuis Sertorius indiqua peut-être les Canaries, étaient supposées exister dans l'océan Atlantique. Horace conseillait à ceux qui étaient las des malheurs de Rome d'aller s'y réfugier; remède poétique à des maux que le ciel seul pouvait alléger.

Pline, qui, en voulant embrasser toutes les matières dans son encyclopédie, n'en approfondit aucune, et qui, dans la géographie, donne aux différents stades le huitième d'un mille romain, ne fait point de distinction entre les auteurs anciens ou récents, et mêle des opinions contradictoires : il estime que l'Europe forme un tiers, plus un huitième du monde continental; l'Asie, un quart, plus un quatorzième; l'Afrique, un cinquième, plus un soixantième. Il n'en faut pas plus pour lui refuser toute croyance en ce qui concerne les pays éloignés; mais cela nous prouve davantage que les anciens ne connaissaient pas la Chine, ni les parties les plus orientales de l'Asie,

Les connaissances géographiques que possédait Strabon ne dépassent pas une ligne tirée du cap Saint-Vincent à l'embouchure du Gange, et des pays arrosés par le Niger jusqu'à l'Elbe en Europe, où nos regards doivent maintenant se porter.

Nous trouvons d'abord à l'occident la péninsule Ibérique, à laquelle Varron donne pour premiers habitants, en outre des Phéniciens et des Carthaginois, les Celtes, les Ibères et les Perses. Il confond sous ce dernier nom les Persques ou Thraces, nation celtique, peut-être venue de la Thesprotie et de l'Illyrie en Italie, où elle fut connue sous le nom d'Umbres, en fut ensuite chassée par les Pélasges, survenus huit générations avant la guerre de Troie. Elle se réfugia alors dans les environs du lac de Constance (Brigantinus lacus), et entre le Rhône et l'Isère, sous le nom d'Allobroges; de là elle s'étendit sur les côtes de l'Espagne les plus voisines des Pyrénées, au midi et au couchant. Leurs établissements se reconnaissent à la désinence en briga, qui se rapporte à celle en bria, usitée chez les Thraces voisins du Bosphore et du Pont-Euxin, selon ce qu'enseigne Strabon au sujet de Selymbria, Mesembria, etc. Or des noms avec cette désinence se retrouvent sur toute la côte de l'Espagne, depuis les sources de l'Ebre jusqu'au cap Sacré; ce qui nous ferait supposer que ces peuples se transportèrent au loin par la navigation. Mais déjà, plus anciennement, les Zacynthiens et les Ardéates, qui étaient de race pélasgique, avaient fondé en Espagne Sagonte, entourée, ainsi que Tarragone, de murs cyclopéens, semblables à

EUROPE.

Espagne.

Gaules.

ceux des villes de l'Étrurie. Nous avons mentionné ailleurs la conformité de noms qui existe entre les villes espagnoles et les villes italiennes (1); noms assez anciens pour ne pouvoir être attribués à des établissements romains d'une date plus ou moins récente (2).

Auguste venait alors de diviser l'Espagne en Lusitanie, Bétique et Tarragonaise. La Bétique ( Andalousie), riche en huiles et en laines fines, possédant des villes opulentes, comme Gadès, Corduba, Hispalis (Séville), était habitée par les Turdétans, qui conservaient d'anciens monuments d'histoire et de poésie. Les Lusitaniens, agiles à la course, terribles dans les guerres de partisans, résidaient entre le Tage et le Douro. Plus au nord étaient les Gallèces (Galices) et les Cantabres, montagnards sauvages que deux cents ans de guerre n'avaient pas encore rendus dociles au joug romain. Parmi eux, les mères égorgeaient leurs enfants plutôt que de les laisser tomber aux mains de l'ennemi, et les fils tuaient leur père lorsqu'ils le voyaient emmener enchaîné. Les Celtibères, débris des conquérants venus de la Gaule, et chez qui l'opiniâtreté dans la résistance dominait le courage impétueux du Gaulois, débusqués de leurs places fortes par les Romains, se pliaient à la vie civile entre l'Ibère (Ebre) et les sources du Tage. Pline comptait trois cent soixante villes en Espagne. Cæsar-Augusta (Saragosse), sur l'Ibère, éclipsait les autres cités de l'intérieur. Augusta Emerita (Merida), capitale de la Lusitanie, offrait un asile aux vétérans, et tenait en bride les populations indépendantes. Tarragone et la nouvelle Carthage florissaient au premier rang des villes maritimes, et par leur industrie, depuis qu'avait péri l'héroïque Sagonte. Dans les îles Baléares s'accroissait une population gaie, voluptueuse, et habile à manier la fronde.

La Gaule se divisait en Belgique, au delà de la Seine; Celtique, entre la Loire et la Seine, appelée depuis Gaule lyonnaise; et en Aquitaine, entre la Loire et les Pyrénées. La côte de la Méditerranée, le Languedoc, la Provence, le Dauphiné, composaient la Narbonnaise. Dans la première, plusieurs nations germaniques mêlées aux Celtes formèrent divers peuples, ayant un autre langage que ces derniers. Les Aquitains étaient de race ibère. Parmi les douze

(1) Voy. tome II, page 414.

(2) Voy. PETIT-RADEL, Mémoires de l'Institut, tom. VI; et aussi GRASLIN, De l'Ibérie, ou Essai critique sur l'origine des premières populations de l'Espagne. Paris, 1838.

cents villes de la Gaule, au midi, Massilia, fille de la Grèce, florissait par de sages lois et par son industrie. Narbonne, siége de la puissance romaine, commençait à s'agrandir; les mœurs y étaient simples, et même un peu grossières. César avait ouvert aux Gaulois la cité et le sénat de Rome; mais Auguste les en repoussa, pour renforcer la nationalité latine; il les chargea même d'impôts plus lourds; il fonda chez eux une ville, à laquelle il donna l'un des noms mystérieux de Rome (Valentia); il établit des colonies à Orange, à Fréjus, à Carpentras, à Aix, à Apt, à Vienne; et les noms de Julia et d'Augusta attestèrent les priviléges serviles de différentes villes. Celles qui se vantaient de leur ancienneté le virent à regret donner la préférence à la nouvelle cité de Lugdunum (Lyon), pour en faire le siége de l'administration. Elle dut cette préférence à sa position favorable au commerce, à la facilité de communiquer avec la mer par son fleuve rapide, et au voisinage des Alpes. L'Hercule phénicien avait jadis ouvert un passage à travers cette chaîne par le col de Tende, et les Romains construisirent, sur les traces de ce symbole de colonisation industrielle, la voie Aurélienne.

Le blé et le seigle abondaient dans ces parages, la vigne prospérait dans la Narbonnaise, l'orme et le bouleau croissaient dans les forêts près du chêne révéré, et le gui des Pyrénées était renommé parmi les druides pour la célébration de leurs rites sacrés. Les Gaulois portaient pour vêtement un manteau court (sagum), une casaque (palla), des braies de couleurs vives et rayées; de là vint à la Narbonnaise le nom de Gallia Bracata, à la différence de la Comata, indépendante, et de la Togata, en deçà des Alpes. On comprenait aussi dans la Gaule celtique la Grande-Bretagne, aux riches pâturages, aux brouillards épais, aux pluies fréquentes, aux mœurs agrestes, aux cabanes dispersées dans les bois. Elle avait excité l'avarice des Romains pour la pêche des perles, et leur jalousie ombrageuse parce que de là partaient sans cesse, comme du foyer du culte druidique, des provocations patriotiques à la Gaule continentale. La Bretagne romaine fut étendue par les conquêtes d'Agricola, et la muraille d'Adrien en fixa la limite du golfe de Solway à l'embouchure de la Tyne. Au delà se trouvaient les Calédoniens, que les Latins crurent s'appeler Picti (1), à cause des figures dessinées sur leurs corps de géants, et qui furent écrasés ensuite

(1) De pictioch, qui en langue celtique signifie larron.

Grande

Bretagne.

Irlande.

Italie.

par les Scots, peuple celtique venu d'Irlande. César est le seul qui mentionne chez les Damnons (Cornouailles) les mines d'étain qui avaient attiré les Phéniciens dans ces parages; les mines d'or, d'argent et de fer étaient plus connues. York était le siége du gouvernement; Londres s'enrichissait par le commerce.

Ierna, qui pourtant est la fertile Érin, est représentée par Strabon comme inculte et d'un climat meurtrier; mais les Bretons la firent ensuite connaître pour riche en pâturages, en ports, et susceptible de se plier à un gouvernement régulier. Les Hiverniens, la nation la plus nombreuse de cette île, lui firent donner le nom d'Hibernia.

Les Celtes de la Bretagne différaient peu pour la manière de vivre de ceux du continent. Ils logeaient dans des huttes coniques, s'armaient, comme eux, de longs sabres; mais ils avaient appris des Calédoniens à se servir de chars de guerre. Ils se peignaient le visage d'une couleur bleue, laissaient croître leurs cheveux et leurs moustaches, et allaient vêtus de peaux. Soumis à de petits princes, ils bâtissaient des villages, se livraient au travail des champs et au soin des troupeaux. Les Calédoniens, au contraire, allaient nus, le corps tatoué de dessins variés; se chargeaient les bras et les reins d'énormes anneaux de fer, et ne vivaient que de chasse, sans se livrer même à la pêche, très-abondante sur leurs côtes.

Les Romains, se servant d'une expression qui peint leur caractère, appelaient notre mer celle qui baigne trois côtés de l'Italie, le quatrième étant fermé par les Alpes, dont le demi-cercle atteint d'une part le golfe d'Adria, et de l'autre le golfe Ligustique. Mais les Alpes étaient mal connues des anciens; ils disputaient même sur le point de savoir si l'Italie était triangulaire ou carrée, et ils prétendaient qu'elle se dirigeait presque de l'orient à l'occident. Un pays dont les limites naturelles sont si bien marquées semblerait avoir dû être désigné par une seule dénomination, et pourtant il ne le fut pas. Les anciens, par l'habitude de nommer les contrées d'après les nations qui les habitaient, contrairement à l'usage moderne, distinguaient en Italie plusieurs pays, selon les habitants. On appela d'abord Italie la péninsule formée par les golfes Scylatique et Lamétique ou de Sainte-Euphémie, qui aujourd'hui est la Calabre citérieure; puis, au temps de l'historien Antiochus, ce nom s'étendit au nord jusqu'au petit fleuve Laus et à Métaponte; vers la fin du cinquième siècle de Rome, il comprenait toute la partie au midi du Tibre et de

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