Imatges de pàgina
PDF
EPUB

Avienus, Aphtone, Au

sone.

Marie de France.

la cour de Claude, d'en donner une version latine; 1667-1669 et Quintilien veut qu'en donnant à lire les fables de ce t. 46-48 recueil aux enfants, on leur fasse rompre la mesure des vers, afin de les mettre en état de les redire naturellement et d'eux-mêmes 77. Ainsi, dans tous les temps, ces ingénieux récits furent considérés comme propres à l'instruction de l'enfance, aussi bien qu'à celle des hommes faits, qui ne sont le plus souvent que de vieux enfants. Postérieurement, et durant la décadence du grand empire des Romains, on ne manqua pas de fabulistes soit grecs, soit latins: Avienus, Aphtone, Ausone parurent suc-. cessivement 78. Dans les âges obscurs de la langue romane, une femme, Marie de France, se distingua par un recueil intéressant de fables en vers, qu'elle annonce avoir été traduites de l'anglais "; transmigration singulière, qui prouve des relations littéraires peu connues entre les deux pays à cette époque, c'est-à-dire au treizième siècle: Mais l'histoire de la littérature anglaise, dans ces temps reculés, est en grande partie ensevelie dans des manuscrits, que n'ont point lus les modernes, et elle est moins connue que la nôtre. En Italie, Faerne et Verdizotti, l'un en latin, l'autre en italien, écrivirent d'intéressants recueils de fables: toutefois, l'utilité, plus que le talent de leurs auteurs, recommandoit tous ces ouvrages; et tous ne paroissoient que l'ouvrage d'Esope sous diverses formes. Nulle gloire ne contre-balançoit celle de l'inventeur primitif.

Mais il n'en fut pas ainsi d'un auteur latin, qui,

Faerne et Verdizotti.

1667-1669 resté pendant des siècles tout-à-fait inconnu, fut A. 46-48 éxhumé par Pithou, de sa bibliothèque, lors de la renaissance des lettres en Europe. Je veux parler de Phèdre. Phèdre. Il est étonnant qu'aucun des anciens qui nous restent, ne l'ait cité. Quoi qu'il en soit, lorsque ses fables furent publiées, les meilleurs critiques s'accordèrent à dire que Phèdre, par son élégance, sa pureté, sa précision, avoit atteint la perfection en ce genre. La Fontaine pensoit ainsi, et peut-être avoitil raison. Fontenelle dit que La Fontaine ne se considéroit comme inférieur à Phèdre, que par bêtise. Ce mot est plus gai et plus spirituel que juste. Si l'on avoit à donner, dans un art poétique, des préceptes pour la composition des fables, l'ouvrage de Phèdre seroit un modèle plus classique que celui de La Fontaine, et on en tireroit une théorie plus exacte et plus vraie pour tracer les règles de ce genre de poésie. Cependant, comme dit quelque part La Fontaine, il est bon de s'accommoder à son sujet, mais il vaut encore mieux s'accommoder à son génie : le sien étoit tellement original et d'une telle trempe,

qu'en empruntant des apologues à tous les auteurs La Fontaine. dont nous venons de parler, et en les mettant en vers, il fit de la fable, considérée de son temps comme peu digne d'exercer le talent d'un poëte, un genre tout nouveau, tellement vaste et varié, qu'il embrassoit tout le cercle des idées humaines, depuis les plus hautes spéculations de la philosophie, jusqu'aux plus humbles préceptes de la vie commune; et qu'il s'approprioit tous les styles

depuis le langage simple, mais harmonieux, et 1667-1669 cadencé d'une Muse gracieuse et familière, jusqu'aux Æt. 46-48 plus sublimes élans de l'enthousiasme poétique.

J.B. Rousseau

luttent

sans

succès contre La Foutaine.

Boileau et Jean-Baptiste Rousseau, les deux plus Boileau et habiles versificateurs que la littérature française ait produits, ont tous les deux, lorsqu'ils se trouvoient dans toute la force de leur talent, refait, après La Fontaine, la fable du Bûcheron et de la Mort; ils ont succombé dans la lutte, et prouvé combien il étoit difficile d'égaler le bon-homme, même dans celles de ses fables, qui ne sont pas au nombre des plus remarquables.

La Fontaine,

fort.

« Le style de La Fontaine, dit Champfort, est peut- Du style de être ce que l'histoire littéraire de tous les siècles offre selon Champde plus étonnant. C'est à lui seul qu'il étoit réservé de faire admirer dans la brièveté d'un apologue, l'accord des nuances les plus tranchantes, et l'harmonie des couleurs les plus opposées. Souvent une seule fable réunit la naïveté de Marot, le badinage et l'esprit de Voiture, des traits de la plus haute poésie, et plusieurs de ces vers que la force du sens grave à jamais dans la mémoire. Nul auteur n'a mieux possédé cette souplesse de l'âme et de l'imagination qui suit tous les mouvements de son sujet. Le plus familier des écrivains devient tout à coup, et naturellement, le traducteur de Virgile et de Lucrèce; et les objets de la vie commune sont relevés chez lui, par ces tours nobles et cet heureux choix d'expressions, qui les rendent dignes du poëme épique 82. »

1667-1669

Harpe.

Le plus original de nos écrivains, dit La Harpe, Et. 46-48 en est aussi le plus naturel. Il ne compose pas, Selon La il converse. S'il raconte, il est persuadé, il a vu : c'est toujours son âme qui vous parle, qui s'épanche, qui se trahit; il a toujours l'air de vous dire son secret, et d'avoir besoin de le dire; ses idées, ses réflexions, ses sentiments, tout lui échappe, tout naît du moment. Il se plie à tous les tons, et il n'en est aucun qui ne semble être particulièrement le sien tout, jusqu'au sublime, paroît lui être familier. Il charme toujours, et n'étonne jamais. Ce naturel domine tellement chez lui, qu'il dérobe au commun des lecteurs, les autres beautés de son style. Il n'y a que les connoisseurs qui sachent à quel point La Fontaine est poëte, ce qu'il a vu de ressources dans la poésie, ce qu'il en a tiré de richesses. On ne fait pas communément assez d'attention à cette foule d'expressions créées, de métaphores hardies toujours si naturellement placées, que rien ne paroît plus simple. Aucun de nos poëtes n'a manié plus impérieusement la langue; aucun surtout n'a plié si facilement le vers français à toutes les formes imaginables. Cette monotonie, qu'on reproche à notre versification, chez lui, disparoît absolument. Ce n'est qu'au plaisir de l'oreille, au charme d'une harmonie, toujours d'accord avec le sentiment et la pensée, que l'on s'aperçoit qu'il écrit en vers. Il dispose si heureusement ses rimes, que le retour des sons semble toujours une grâce et jamais une nécessité. Nul n'a mis dans les rhythmes

une variété si prodigieuse et si pittoresque; nul n'a 1667-1669 tiré autant d'effets de la mesure et du mouvement. E. 46-48 Il coupe, brise ou suspend son vers comme il lui plaît. L'enjambement qui sembloit réservé aux vers grecs et latins, est si commun dans les siens, qu'à peine y fait-on attention. L'harmonie imitative des anciens, si difficile à égaler dans notre poésie, La Fontaine la possède dans le plus haut degré. C'est de lui surtout qu'on peut dire qu'il peint avec la parole. Dans aucun de nos auteurs on ne trouvera un si grand nombre de tableaux dont l'agrément soit égal à la perfection 83.

Ce grand critique, devenu plus sévère vers la fin de sa carrière, a encore ajouté, dans son Cours de Littérature, aux éloges qu'il avoit faits de La Fontaine; et il faut remarquer, en effet, qu'on apprécie davantage cet auteur, à mesure qu'on avance en âge. Son bon sens nous paroît d'autant plus exquis, son style d'autant plus enchanteur, qu'une longue expérience, et beaucoup de lecture, nous ont fait voir l'inanité de tant d'orgueilleux systèmes, l'éclat trompeur de tant de phrases sophistiques ou vides de sens, et l'odieuse affectation de tant de vertus factices. Tous nos grands écrivains, soit en vers, soit en prose, se sont plus à rendre hommage au talent de La Fontaine, et lui ont tous reconnu le même genre de mérite. Remarquons aussi que la plupart ne l'ont pas loué comme un auteur que l'on admire, mais comme un ami que l'on chérit; plusieurs même, inspirés par un tel sujet, ont déployé alors un talent

La Fontaine

est le poëte

de

lage mur

et des gens de gout.

« AnteriorContinua »