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avecjoie, accueilli avec empressement, parle de vers, 1684-1687 et oublie son procès; on l'invite à coucher, il con- Æt. 63-66 sent à rester. Il dort toute la nuit, et se réveille tard dans la matinée; mais en se réveillant il se rappelle enfin le motif pour lequel il s'est mis en route; il repart, arrive trop tard, et essuie les reproches de son ami. Sans se déconcerter, La Fontaine répond froidement qu'il est bien aise au fond de cet incident, parce qu'il n'aimoit ni à parler d'affaires, ni à en entendre parler 68.

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de plusieurs

de

La Fontaine.

Le désir qu'avoit La Fontaine de céder à la vo- Des canses lonté des autres, et de ne rien faire qui pût leur naïvetés être désagréable, contrarioit les habitudes qu'il avoit prises de ne supporter aucune contrainte, et lui arrachoit quelquefois, pour se tirer d'embarras, des réponses qui, de la part de tout autre, eussent été impolies et grossières, mais qui de la sienne ne paroissoient que plaisantes, parce que tout le monde connoissoit ce caractère doux et inoffensif, qui lui avoit si universellement mérité le surnom de bon homme. Le Verrier, financier de ce temps, qui avoit le triple travers de vouloir passer pour homme à bonne Fontaine à un fortune, pour ami des grands seigneurs, et pour savant, avoit invité La Fontaine à dîner, dans l'espérance qu'il amuseroit ses convives. La Fontaine mangea, et ne parla point. Comme le dîner se prolongeoit, il s'ennuya, et il se leva de table sous prétexte de se rendre à l'Académie. On lui fit observer qu'il n'étoit pas encore temps, et que deux heures venoient de sonner. « Ah! bien, ré

Réponse naïve de La

dîner chez Le Verrier.

El. 63-66

1684-1687 » pondit-il, je prendrai le plus long. » Et il sortit9. En 1685, on imprima en Hollande un recueil complet des contes de La Fontaine, avec des figures Contes et de Romain de Hoage. Ce recueil eut un grand vers, vel succès; car il fut réimprimé la même année, et on

Nouvelles en

2

in - 13, avec

les figures de

Hooge. Ams

de Pavle sur

an sujet de

celte édition.

Romain de en multiplia rapidement les éditions et les contreterdam, 1685. façons 9'. Bayle, en rendant compte de cette édiJugement tion, dans son journal, dit : « Avec la permission La Fontaine de ceux qui mettent l'antiquité si au-dessus de notre siècle, nous dirons ici franchement, qu'en ce genre de compositions, ni les Grecs, ni les Romains, n'ont rien produit qui soit de la force des contes de M. de La Fontaine, et je ne sais comment nous ferions pour modérer les transports et les extases de MM. les humanistes, s'ils avoient à commenter un ancien auteur, qui eût déployé autant de finesse d'esprit, autant de beautés naturelles, autant de charmes vifs et piquants, que l'on en trouve dans ce livre-ci 92. >>

La Fontaine n'eut aucune part à celte édition.

Tout porte à croire que La Fontaine n'eut aucune part à cette édition. Par un juste sentiment des convenances, et un reste de respect pour les mœurs, il ne publia point de recueil de contes gravures dans avec figures; tandis qu'il ne fit jamais paroître un

La Fontaine

n'a jamais souffert

de

ses contes, et

n'a jamais pu recueil de fables sans cet ornement, si utile dans ces

blié de fa

bles sans cet sortes d'écrits pour l'enfance et pour la jeunesse.

ernement.

LIVRE CINQUIÈME.

Et. 63-66

DANS le Recueil des Contes publié en 1685, les éditeurs de Hollande terminent ainsi leur Avertissement. «Mais, parce que l'on est très-bien informé que M. de La Fontaine n'est pas celui qui prise le plus ses ouvrages, et qu'il n'est pas fort exact à les conserver, on prie ceux qui en pourront recouvrer, qui n'auront pas été imprimés, d'en vouloir faire part au public, qui leur en sera redevable.

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d'Alexandre, Cesar et de M. Le Prince. 1684.

de pe

La Fontaine, en effet, écrivoit un assez grand nombre de petits opuscules, qu'il ne se donnoit pas la peine de recueillir, et dont plusieurs n'ont été imprimés qu'après sa mort. C'est ainsi que dans une lettre à un des princes de Conti, il fit une comparaison Comparaison d'Alexandre, de César et du prince de Condé, qui montre des connoissances historiques et un excellent jugement'. Une idée, sur laquelle il revient plusieurs fois dans ce parallèle, devoit le conduire à une sorte de scepticisme qui convenoit bien à l'indécision de son caractère, c'est que toutes les choses ont deux faces, et qu'on peut par conséquent disputer de part et d'autre tant qu'on voudra. « Ainsi, dit-il, >> Charles Stuart a empêché de tout son pouvoir qu'on n'ait cherché les conspirations qui se fai» soient contre lui. Il ne vouloit point qu'on punît >> les conspirateurs; par là il se fit aimer, et ne se

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1684-1687» fit pas assez craindre. » La Fontaine juge assez El. 63-66 bien, et même assez sévèrement, les fautes de ses héros; mais il est plein d'indulgence pour eux,

La Fontaine

excuse

les héros les

quand c'est l'amour qui les fait faillir. «< Jules César,

>>

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que »

fantes l'amour fait commettre.

>>

dit-il, a des traits d'humanité et de clémence; mais j'ai peine à lui pardonner deux fautes : l'une, » de ne s'être point assez défié de Brutus; l'autre, » de s'être laissé présenter le diadème, et d'avoir fait une tentative si périlleuse : car, quant à l'amour ans» de Cléopâtre, je trouverois les grands personnages bien malheureux, s'ils étoient obligés de ne vivre que pour la gloire. J'estime autant la conquête de cette reine, que celle de l'Egypte entière. Du tempérament dont César étoit, il en devoit devenir amoureux; c'est une marque » de son bon goût. Je le loue d'avoir été formarum » spectator elegans. Alexandre et M. le Prince en » ont usé de la sorte. Je pourrois tirer mes exemples » de plus haut, et alléguer Jupiter, quem Deum? » Ce Jupiter, ce Dieu, étoit Louis XIV. Malheureusement les exemples qu'il avoit donnés avoient mis en crédit cette morale relâchée.

Détails sur le grand Condé.

pour La Fontaine.

On pense bien que, dans ce parallèle, le grand Condé n'y est pas jugé avec sévérité. Ce prince aiSon amitié moit beaucoup La Fontaine, qui ne fit cet écrit que parce qu'une indisposition l'empêchoit de se rendre à l'invitation du héros. Depuis l'année 1675, que le grand Condé quitta le commandement des armées, jusqu'à 1686, époque où, victime de l'amour paternel, il mourut de la maladie qu'il prit auprès

de la duchesse de Bourbon sa fille, il coula des jours 1684-1687 heureux dans sa belle retraite de Chantilli, qu'il . 63-66 rendit le centre des beaux arts et des sciences 2. Il aimoit à discuter. « Les contestations de M. le Prince, dit La Fontaine dans sa lettre, sont fort vives, il cussions. n'ignore rien non plus que vous. Il aime extrê

>>

» mement la dispute, et n'a jamais tant d'esprit que quand il a tort. Autrefois la fortune ne l'auroit » pas bien servi, si elle ne lui avoit opposé des en» nemis en nombre supérieur, et des difficultés presqu'insurmontables. Aujourd'hui il n'est plus >> content que lorsqu'on peut le combattre avec une >> foule d'autorités, de raisonnements et d'exemples; » c'est là qu'il triomphe. Il prend la victoire et la >> raison à la gorge pour les mettre de son côté. »

>>

Son goût

pour les dis

mier prince

leg novembre

1685.

Ce parallèle est dans une lettre adressée en 1684, à Louis Armand, prince de Conti, celui-là même, dont La Fontaine avoit célébré le mariage, avec Mlle de Blois 3, dans son épître à la duchesse de Fontanges. Ce prince mourut à Fontainebleau à la fleur Mort du prede l'àge, le 9 novembre 1685, de la petite vérole de Conti qu'il avoit gagnée, en soignant sa femme, atteinte de la même maladie. Ce qui étonna d'autant plus qu'il ne vivoit pas bien avec elle. Par la mort de Louis Armand, François Louis, son frère, connu auparavant sous le nom de prince de la Roche-surYon, devint prince de Conti. Ce fut un des hommes Portrait du les plus brillants du siècle de Louis XIV, mais peu estimable par ses mœurs : doué d'une figure charmante, séduisant auprès des femmes, il savoit,

second prince

de Conti.

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