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productions de notre poëte! Cette fable se termine 1675-1679

ainsi :

Proprement toute notre vie

Est le curé Chouart qui sur son mort comptoit,

Et la fable du Pot au lait.

Æl. 54-58

Ainsi la fable charmante de la Laitière et le Pot Plusieurs

des fables de

non publiées circuloient en

au Lait, inconnue encore à Mme de Sévigné, étoit La Fontaine composée en 1672, et sa lettre nous prouve que manuscrit. plusieurs des fables, qui ne furent publiées qu'en 1678, circuloient déjà en manuscrit.

sur le curé Chouart ré

Ce passage de la lettre de Mme de Sévigné réfute complètement un conte ridicule, que Fréron a consigné dans son Année littéraire en 1775, et qui est fondé uniquement sur le nom de Jean Chouart, que La Fontaine a donné au curé de sa fable 105. Un nommé Choquet, qui se dit prêtre, assure au journaliste que La Fontaine n'a écrit la fable du Curé Anecdote et du Mort, que pour se venger du curé Chouart, Cha personnage réel, suivant lui, et d'une famille distinguée de la Touraine, qui, dans un dîner où se trouvoient Racine et Boileau, avoit adressé des reprimandes au fabuliste, sur le scandale de sa séparation avec sa femme. Pour achever de démontrer la fausseté de cette anecdote, il suffit d'ajouter à ce que nous venons de dire sur la véritable origine de cet apologue, que le nom de Messire Jean Chouart se trouve dans Rabelais 106: La Fontaine ne s'en est servi, que parce que ce facétieux écrivain l'avoit, en quelque sorte, rendu populaire, pour désigner celui d'un homme d'église, que l'on vouloit

1675-1679 ridiculiser. J. B. Rousseau l'a aussi employé dans Et. 54-58 une de ses épigrammes 17. Remarquons que si La Fontaine a laissé échapper de sa plume une ou deux La Fontaine épigrammes, jamais il n'a souffert qu'on les imimprimer une primât de son aveu. Dans tout ce qu'il a fait pa

n'a jamais fait

seule ligne sa

tirique con

tre qui quece roître de son vivant, il n'y a pas une seule ligne

soit.

qui soit dirigée contre quelqu'un en particulier, ou écrite dans l'intention de blesser qui que ce soit.

Il y a dans ce second recueil cinq fables, dédiées à différentes personnes, savoir, à M. Barillon, au duc de La Rochefoucauld, à Mlle de Sillery, à Me de La Sablière et à M. le duc du Maine. Celle qui est dédiée Fable dédiée à M. Barillon est intitulée le Pouvoir des Fables 108.

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à M. Barillon.

Liv. 8 Fab. 4.

intitulée

Pouvoir des
Fables.

de Pour bien entendre le prologue et les louanges que

La Fontaine fait de M. Barillon, il faut rappeler les circonstances qui y donnèrent lieu, et suppléer encore au silence des commentateurs.

Explication Charles II avoit été rétabli en 1660, sur le trône du prologue de cette fable. de ses pères. Jamais règne ne commença sous de

plus heureux auspices que le sien. Tous les partis, tour à tour oppresseurs et opprimés, avoient espéré trouver sous son sceptre légal deux sortes d'avantages que l'on s'efforce si souvent en vain de concilier, la liberté et le repos. Le jeune roi éprouva bientôt combien après un long interrègne d'anarchie et de despotisme, il est difficile de raffermir un trône qu'un usurpateur a, par de grands succès, entouré d'un éclat passager. Dans cette position Charles avoit également à se garantir de ses amis

et de ses ennemis; il étoit jeune, aimoit le plaisir, 1675-1679 détestoit le travail, et n'avoit aucune des qualités . 54-58 nécessaires pour surmonter tant d'obstacles. Il ne pouvoit se passer du parlement, et le parlement s'opposoit à toutes les mesures qu'il vouloit prendre. Bientôt il ne put gouverner avec lui ni sans lui. Louis XIV profita de son embarras, lui fit parvenir des subsides, et lui promit par son appui de le soustraire à la tutelle de la chambre des communes. Pour ces négociations délicates, Louis XIV choisit Barillon, homme d'un esprit vif, aimable, ami intime de Mar de Sévigné, de Mme de Grignan sa fille, de Me de Coulange et de toute la société que La Fontaine fréquentoit le plus habituellement, et où il se plaisoit davantage. Par l'habileté de ce négociateur et par les subsides de Louis XIV, l'Angleterre indignée devint l'instrument mercenaire de la grandeur de la France. Mais enfin, lorsque celle-ci se fut emparée, avec tant de rapidité, de la Flandre, de la Franche-Comté et d'une moitié de la Hollande, presque toute l'Europe alarmée se ligua contre le grand monarque, et le parlement que Charles II avoit assemblé le plus tard possible, mais enfin qu'il avoit été forcé d'assembler, et qui ouvrit ses séances le 13 avril 1675, le contraignit se joindre aux autres puissances pour entrer sérieusement dans les négociations qui amenèrent, peu de temps après, la paix de Nimègue. C'est durant les débats très-vifs, qui eurent lieu à ce sujet dans la chambre des communes 19, que La Fontaine dédia

1675-1679 la fable, dont nous avons parlé, à M. Barillon.

Et. 54-58

Fable dédiée

à Mademoi

selle de Sil

La qualité d'ambassadeur

Peut-elle s'abaisser à des contes vulgaires?

Vous puis-je offrir mes vers et leurs grâces légères?
S'ils osent quelquefois prendre un air de grandeur,
Seront-ils pas
par vous de téméraires?

traités

Vous avez bien d'autres affaires

A démêler que les débats

Du lapin et de la belette.

Lisez-les, ne les lisez pas :

Mais empêchez qu'on ne nous mette

Toute l'Europe sur les bras.

Que de mille endroits de la terre

Il nous vienne des ennemis,

J'y consens; mais que l'Angleterre

Veuille que nos deux rois se lassent d'être amis;
J'ai peine à digérer la chose.

N'est-il point encor temps que Louis se repose?
Quel autre Hercule enfin ne se trouveroit las
De combattre cette hydre? Et faut-il qu'elle oppose
Une nouvelle tête aux efforts de son bras?

Si votre esprit plein de souplesse,

Par éloquence et par adresse,

Peut adoucir les cœurs et détourner ce coup,
Je vous sacrifierai cent moutons : c'est beaucoup
Pour un habitant du Parnasse 110.

Quant à Mile de Sillery à laquelle La Fontaine

ler Livs a dédié cette jolie églogue qui forme la treizième

Fable 13, in

et Amarante.

titulée Tircis fable du livre VIII, il y a lieu de croire qu'elle étoit la sœur de ce chevalier de Sillery, attaché au

duc de Bourbon, et auquel La Fontaine écrivit une lettre en vers et en prose, dont nous parlerons par la suite. Voltaire, qui est resté sans rival dans la poésie légère, admiroit beaucoup le prologue de cette fable, qui est, suivant lui, un modèle de grâce et de finesse. Il paroît que Me de Sillery lisoit les Contes de La Fontaine, mais qu'elle n'osoit pas avouer qu'elle pût bien les comprendre. C'est pour

quoi elle engageoit notre poëte à écrire des fables 1675-1679 de préférence. Il lui obéit; mais sans doute, bien . 54-58 instruit de ses inclinations secrètes, il en composa

une où il n'est question que d'amour.

J'avois Esope quitté

Pour être tout à Bocace;
Mais une divinité

Veut revoir sur le Parnasse
Des fables de ma façon.
Or, d'aller lui dire, non,
Sans quelque valable excuse;
Ce n'est pas comme on en úse
Avec les divinités;

Surtout quand ce sont de celles
Que la qualité de belles
Fait reine des volontés.
Car afin que l'on le sache
C'est Sillery qui s'attache
A vouloir que, de nouveau,
Sire loup, sire corbeau,
Chez moi se parlent en rime:
Qui dit Sillery dit tout.

Mes contes, à son avis,
Sont obscurs. Les beaux esprits
N'entendent pas toute chose.
Faisons donc quelques récits
Qu'elle déchiffre sans glose 112.

113

nou

à Madame de La Sabliere. Liv. x. Fab. 1.

A cette époque Descartes et ses disciples avoient, Fable dédiée par leurs arguments, donné une réputation de veauté à une question de métaphysique bien ancienne celle qui concerne l'âme des bêtes. On avoit publié de part et d'autre des traités 3, , que La Fontaine n'avoit pas lus. Mais il avoit, chez Mme de La Sablière, entendu débattre ces matières par Bernier et par d'autres savants; et, comme une telle question l'intéressoit vivement, il y rêva de son

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