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danger, tantôt à cause de la répu gnance anglicane à entendre impartialement les arguments des caiholiques, il en vint à plaider sérieusement et chaudement leur cause (4 mars 1827), sans toutefois obtenir un triomphe. La motion pour laquelle il parlait fut rejetée à la majorité de 4 voix. Nous devons ajouter, pour compléter ce tableau, que, le 19 mai 1826, il s'était encore opposé à une motion tendante à l'amélioration du sort des esclaves. « Le principe, disait-il alors, est juste, mais les mesures sont prématurées aller trop vite, c'est risquer de manquer son but; y teudre lentement, c'est le Sy moyen de rendre le succès certain. » Le 27 mars suivant il soumettait à la chambre sa correspondance avec le ministre des Etats-Unis à Londres, relativement au commerce entre les colonies de la Grande-Bretagne et l'Union. Cette correspondance était un modèle de clarté, de logique, d'esprit de conciliation. C'est peu de jours après cet exposé qu'il fut appelé au poste de lord Liverpool. On a vu quelle fut sa situation après cette promotion subite, et de quels auxiliaires il s'entoura. Tous les yeux étaient fixés sur la Grande-Bretagne et vers le chef de son cabinet, que l'on regardait universellement comme le directeur de la puissance libé rale qui aspirait à modifier l'Europe. Il venait de signer avec la France et la Russie (6 juillet 1826) un traité dont le but était d'effectuer une réconciliation entre la Turquie et la Grèce, et, en cas de refus, de mettre fin à la querelle par la voie des armes. Les conséquences de cette alliance étaient incalculables, et les projets de Canning n'allaient sans doute à rien moins qu'à éliminer la Porte-Ottomane de l'Europe, lorsque

sa santé baissa visiblement. Il alla vers le milieu de juillet passer quelque temps à la délicieuse villa du duc de Devonshire à Chiswick, dans l'espoir que le changement d'air améliorerait son état. Mais son mal ne fit que s'aggraver. Il s'occupa encore d'affaires publiques le 31 juillet. Mais le 2 août il fut obligé de garder le lit, et le 8, à quatre heures du matin, il avait cessé d'exister. Ses funé, ailles, qui earent lieu le 16, furent simples, mais remarquables par l'affluence de tout ce que Londres comptait de personnages distingués. Il est inutile de dire que cette mort, au milieu de tant de grands évènements accomplis ou sur le point de s'accomplir, produisit une sensation profonde, et son absence ne tarda pas à se faire sentir dans la politique générale de l'Europe. On doit avoir néanmoins deviné que Canning à nos yeux ne fut un grand homme ni par la tête, ni par le cœur. Il était ambitieux, il avait une prodigieuse facilité d'élocution et de sophisme. Sa versatilité, en dépit des explications les plus subtiles, ne peut être excusée ni même palliée. Loin de faire les évènements, loin de diriger les hommes, il fut au contraire traîné par eux à la remorque. Ne parlons pas de sa position inférieure sous Pill, ce n'est pas à cette époque qu'il faut chercher dans le disciple, dans l'ambitieux jeune homme, le meneur de la politique européenne. Mais plus tard, pendant et après le règne de Castlereagh, quel fut son rôle ? Complaisant de Castlereagh qu'il méprise, qu'il offense et qu'il soutient à la chambre, de temps à autre il le boude, il feiut de se rallier aux whigs; puis, quand il s'est approché de ce parti, il se laisse accaparer par lui, il est entraîné dans sa sphère;

en vain il est lent à le suivre, et s'en ont été recueillies après sa mort, écarte quelquefois; il y revient, si- et publiées en anglais et en français, non en ligne droite, du moins en spis avec une notice sur sa vie, par rale, et finit par être obligé de se Benj. La Roche, Paris, 1827, inlaisser nommer son chef. Encore ses 18, avec portrait. Canning avait puaides-de-camp momentanés ne lui blié plusieurs discours ou analyses cachent-ils pas que son règne est de ses discours, et trois lettres au court, qu'ils attendent, qu'ils l'u- comte de Camden (in-8°, 1809): sent jusqu'à la corde, puis le laisse- la dernière était relative à son duel ront là. Tel est le revers de la mé- avec Castlereagh. P-or. daille louangeuse frappée en France CANON (PIERRE), jurisconsulte à l'honneur de Canning, et qui con- né à Mirecourt, vers la fin du seiziè tient d'un côté ces mots : Liberté ci- me siècle, fut anobli, en 1626, vile et religieuse dans tout l'uni- par le duc de Lorraine, Charles IV, vers; de l'autre : Au nom des peu- «en considération de sa probité, ples, les Français à George « doctrine et capacité, et de l'estime Canning. La ville de Liverpool, qui a et réputation en laquelle il estoit l'envoya quatre fois au parlement, << entre les premiers de sa profession lui a élevé une statue de bronze. Con « au bailliage de Vosges. » Il fut sidéré sous le rapport littéraire. Can- ensuite pourvu de la charge de juge ning mérite une mention distinguée. assesseur au même bailliage. Canon Nous avons caractérisé son éloquen- est auteur d'un Commentaire sur ce railleuse, sophistique, souvent les coustumes de Lorraine, auquel pompeuse et riche en images. « Et sont rapportées plusieurs ordontoi, le dernier survivant de nos ora. nances de son altesse et des ducs teurs, s'est quelque part écrié By- ses devanciers, Espinal, 1634, ron, qui certes éprouvait peu de sym- pet. in-4° de 494 p. Le commentapathie pour Canning. Celui-ci avait teur établit sur chaque article de la gardé le goût de la polémique des coutume un certain nombre de prinjournaux, et il fut long-temps un des cipes généraux, en forme de règles collaborateurs actifs de la Quarterly de droit. Il les accompagne d'une Review. Comme poète, il n'eut pas glose dans laquelle on désirerait troule temps de se développer. Nul ver, à de moins longs intervalles, doute qu'il n'eût aussi dans cette des décisions plus immédiatement apcarrière acquis de la célébrité. Son plicables à la Lorraine. On prétend, style correct et pur ressemble à son dit Camus, « que le commentaire éloquence: toutefois il est un peu « donné sur la coutume de Lorraine sec, et comme presque tous ses mor- par Abraham Faber test de Florenceaux consistent en satires de la dé-« tin Thieriat et de Canon. magogie francaise, le ton en est dogmatique et uniforme. Les idées aussi et même les formes qu'il donne à ses idées sont un peu surannées. Les Mallet-Dupan. les Rivarol ont fait presque tous les frais du perpétuel argumentabor de l'Apollon anti-jacobin. Ses poésies et quelques autres

Cette indication est erronée, en ce qui concerne ce dernier dont l'ouvrage avait paru vingt-trois ans avant la publication de celui de Fabert.—CANON (Claude François), fils du précédent, né à Mirecourt, en 1638, s'éleva, par son mérite, aux principales chargés de la magistrature. De

venu premier président de la cour souveraine de Lorraine, il fut en voyé, par le duc Léopold, comme ministre plénipotentiaire au congrès de Ryswick. Négociateur habile, il contribua beaucoup à faire rendre moins onéreuses les conditions du traité de paix qui rétablit le duc dans ses états. Il mourut en 1698. La bibliothèque publique de Nancy possède un manuscrit qu'on lui attribue. Il est intitulé: La Médaille, ou expression de la vie de Charles IV, duc de Lorraine; par un de ses principaux officiers. On a publié six années après sa mort l'Ombre de M. Canon et sa descente aux Champs-Elysées, 1704, pet. in-12 Cet ouvrage contient des particularités curieuses sur l'histoire de Lorraine, depuis le règne de Charles IV.

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CANOVA (ANTOINE), le rénovateur de la sculpture moderue, naquit le 1er novembre 1757 à Possagno, dans la province de Trévise, de Pierre Canova, architecte et sculpteur, qui mourut à l'âge de vingtsept ans. Sa veuve épousa François Sartori, de Crespano, et voulut emmener avec elle dans ce bourg, voisin de Possagno, le jeune Antoine âgé de quatre ans; mais Pasino Canova, grand-père de l'enfant, n'y vou lut pas consentir; il était riche et possédait des carrières d'une pierre recherchée pour sa qualité. A peine Antoine avait-il cinq ans que son aïeul mit dans ses mains la masse et le ciseau. L'enfant manifesta dès ce moment une grande intelligence; mais Pasino, ayant éprouvé des mécomptes dins ses opérations, se vit ruiné, et dans son désespoir il maltraitait son petit-fils, qui un jour était près de se donner la mort, si Pasino effrayé et allendri ne l'eût retenu,

Antoine avait quatorze ans lorsque son grand-père le conduisit chez Jean Faliéro, sénateur vénitien, qui passait l'automne dans une terre à Pradazzi près de Possagno. Faliéro aimait les beaux-arts; il vit avec plaisir les premiers travaux du jeune artiste, lui donna des éloges et lui prédit de glorieux succès. Il pensa même à le placer comme élève chez un sculpteur de Pagnano, nommé Torretto, qui était de mœurs très-sévères. Antoine prit auprès de lui des habitudes de modestie qu'il a gardées toute sa vie. L'amour vint le surprendre au milieu de ses premiers travaux. Ayant rencontré une assez nombreuse réunion de jeunes bergères vêtues de leurs habits de fête, il en distingua upe, Betta Biasi, remarquable par des yeux noirs étincelants de grâce et de beauté, et par une chevelure qu'il disait plus tard n'avoir retrouvée que dans les descriptions d'Apulée. Déjà l'on parlait de mariage: Pasino y consentait. Betta Biasi était sensible aux agréments de l'esprit et de la figure d'Antoine, mais Torretto voulut alors aller s'établir à Venise, et son élève fut contraint de l'y suivre: la, tout en regrettant les plaisirs de Possagno, il continuait à se perfeetionner dans son art. Après avoir travaillé sur les plans souvent impar faits du maître, à ses heures de repas il allait étudier le modèle vivant à l'académie. Torretto étant mort, l'atedans les mains de son ne

lier

passa veu et de son premier élève, Jean Ferrari, qui consentit à garder Antoine, mais plutôt pour le réduire à une condition servile que pour achever de l'instruire. Pasino ayant eu connaissance des plaintes d'Antoine, vendit la dernière propriété qu'il possédait, et du produit de cette terre, qui s'éleva à cent ducats

vénitiens, il promit de payer une
pension pour son petit-fils pendant
un an, pourvu que Ferrari permit
à l'élève d'aller étudier à l'académie.
Canova ne reçut jamais que ce se-
cours de la maison paternelle. Le
bienfaisant Faliéro, se souvenant de
ses prédictions. voulut commander
à Canova son premier ouvrage. Il le
pria donc d'exécuter pour lui, en
marbre statuaire, deux corbeilles de
fleurs et de fruits, destinées à orner
la rampe d'un escalier: on les voit
encore an palais Farsetti à Venise.
Ce travail rempli de difficultés ayant
été porté à un degré remarquable
de finesse d'outil et de dextérité,
Faliéro commanda à Antoine deux
statues: Orphée et Euridice. L'ar-
tiste pensa donc à se séparer de Fer-
rari, et à ouvrir des ateliers pour son
propre compte à Possagno et à Ve-
nise. Ce fut alors véritablement qu'il
entra dans la pratique de l'art
prement dit de la sculpture, ou au-
trement de l'imitation du corps hu-
main par les formes en plein relief
de la matière. Canova n'avait plus de,
guide, il moutra bien en cette cir-
constance qu'il devait être ce que les
Grecs expriment par un seul mot
(avrodidaaxaros) son propre maître.
il chercha, il trouva des modè-
les et il commença ses esquisses;
après avoir conçu, repoussé, repris
quelques inventions tout-à-fait nou-
velles, il s'arrêta à celle-ci. La jeu-
ne Euridice était déjà enlevée par les
furies, et forcée de reprendre le
chemin de l'Enfer: Orphée qui mal-
gré ses promesses s'était retourné,
pour revoir son épouse, portait
sur ses traits le repentir de sa fau-
te. Ces travaux s'exécutaient à Possa-
gno où Canova avait plus de liberté,
mais il ne fallait pas abandonner les
Jeçons de l'académie de Venise, où

pro

l'artiste revenait à pied jusqu'aux lagunes. Tadini dit, à propos de ces statues, que Canova dut à Virgile les plaintes d'Euridice, et à Ovide la consternation d'Orphée, mais qu'il dut à lui seul l'acte par lequel les deux statues se parlent et se répondent. Il avait choisi pour les exécuter deux morceaux semblables de cette belle pierre du pays qui rivalise avec le marbre. Une répétition, de quatre pieds de hauteur, en marbre de Carrare, fut demandée par Marc Antoine Grimani, et elle contribua à répandre dans tout le Trévisan le nom de l'auteur; bientôt Ange Quérini commanda le buste du doge Renier. Ce fut alors que la marquise Spinola, excitée par les recommandations d'André Memmo, voulut avoir de Canova une statue d'Esculape, haute de sept pieds, qui devail offrir les traits du sénateur Alvise Valleresso; mais l'auteur, en la livrant, se déclara mécontent de son ouvrage, qui péchait surtout par la draperie. Il n'avait aucune idée ni fait aucune étude, dans l'antique, de cette partie de l'ajustement des statues. Peut-être verra-t-on qu'il aura conservé quelques habitudes de ces temps de son jeune âge, dans la manière et dans l'exécution de celles de ses draperies sur lesquelles la suite de nos descriptions devra nous ramener? Il s'occupa peu de temps après de deux autres statues, Apollon et Daphné, qui sont restées en modèle ; il les abandonna pour un groupe de Dédale et Icare. A peine Dédale a-t-il appliqué une aile sur l'épaule de son fils, que celui-ci tourne la tête en souriant, et semble demander avec un air de confiance, de présomption et de surprise, pourquoi son père témoigne quelque doute, et une inquiétude inutile. A Venise, quoique le goût des arts ne fût

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pas universel, comme il l'avait été autrefois, on applaudit à ce travail; mais Venise, il faut le dire, ne suffisait plus à un génie qui demandait à étendre sa gloire. Cette ville, n'étant plus le centre d'une activité politique hardie, ne pouvait pas donner d'aliments à l'ambition des artistes; il ne lui restait, en ce genre, qu'à s'enorgueillir des productions de ses temps de puissance au seizième siècle. Al'époque du renouvellement des arts elle avait joué un grand rôle, mais plutôt dans ses travaux de peinture et d'architecture: Venise enfin, et ce fait est bien démontré par l'histoire de Canova, n'avait pas alors un seul statuaire. L'enthousiasme de cette ville pour les œuvres imparfaites d'un jeune homme qui avait travaillé sans maître, sans conseils, n'était qu'un encouragement pour aller chercher un autre théâtre. Il fallait done que Canova quittât une ville où il ne se serait formé qu'un style fidèle à l'imitation, sans art, de la nature bornée à l'individu; il fallait que son goût et son esprit allassent pénétrer profondément dans le secret de cette imitation qu'on appelle idéale, ou généralisée. Or, ce secret qui, même quand on ne voit que les formes d'un seul corps ou d'une exactitude individuelle, consiste à s'élever jusqu'à l'universalité de caractère, de proportion, d'harmo nie, de convenances et de beauté abstraite; ce secret, l'art des Grecs l'avait pu seul deviner; il pouvait être encore à Rome; il fallait l'aller conquérir. Le groupe de Dédale et Icare avait été payé cent sequins. En voyant compter cette somme, Canova s'écria: a Voilà mon voyage à « Rome. » Il avait à terminer la statue du marquis Poléni, mais il promit de revenir pour l'achever. Canova partit de Venise pour Rome

à la fin d'octobre 1779. Le soir de son arrivée il courut à l'académie de France al Corso, pour y voir l'étude du nu. Le lendemain, il se présenta chez le chevalier Zulian, ambassadeur de la république, qui lui proposa un logement dans son palais, lui conseilla de faire venir a Rome le plâtre de son groupe de Dédale, et d'aller en attendant visiter les nouvelles découvertes de Naples. Quel était alors l'état des arts à Rome? L'école romaine toujours. en présence des admirables monuments de l'antiquité, n'avait jamais perdu le sentiment des beaux-arts. Cependant on venait de découvrir Herculanum et Pompei; Winckelmann avait paru; Ennius Visconti commençait à écrire, et les descriptions du Musée Clémentin, dues à son père, éveillaient l'attention. Gavino Hamilton, assez bon peintre, se distinguait parmi ceux qu'on appe lait antiquaires. Son suffrage devenait une autorité il était vénéré par le chevalier Zulian, et il pensa, après avoir vu le plâtre du Dédale, que l'ambassadeur devait de plus en plus encourager son jeune compatriote et lui procurer au plus tôt un marbre de Carrare, pour qu'il sculptât un nouveau sujet à son choix. Canova accepta le défi. Quand il vit devant lui ce marbre qui attendait la vie, élève de lui-même, comme nous l'avons dit, il sentit qu'il n'avait eu jusqu'alors pour guide qu'un sentiment irrésolu, et une divination vague de ce qu'avait été l'état primitif des arts dans les siècles modernes : il reconnut le besoin d'une instruction qui le mît à même de se rassurer dans les ténèbres. Cette instruction préliminaire, il la trouva chez Gavino Hamilton, homme singulièrement habile dans la connaissance de l'état

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