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fut néanmoins acquittée. Le 1er prairial an III (21 mai 1795), lorsque le peuple des faubourgs se porta à la Convention pour demander du pain et la constitution de 93, Aspasie excitait, avec les accents de la rage, une troupe de mégères qui l'entouraient. On lui avait dépeint Boissy-d'Anglas comme cause de la disette, et elle avait formé le dessein de le poignarder; plusieurs fois elle s'était rendue chez lui dans cette intention. Ce fut ce jour-là que le député Féraud périt; Aspasie aida à l'assommer, en le frappant de ses galoches. Elle se précipita ensuite sur Camboulas, un couteau à la main ce député ne réussit qu'avec peine à se soustraire à sa fureur. Dénoncée et arrêtée pour ces assassinats, Aspasie convint de tous les faits qui lui étaient imputés, et prétendit qu'elle n'avait obéi qu'aux impulsions des émigrés, des Anglais, des royalistes, etc. Elle ajouta qu'on avait répandu de l'argent, et que le but du complot était de s'emparer du fils de Louis XVI, qui était au Temple, et de le proclamer roi. Elle ne voulut néanmoins nommer aucun de ses complices. On fut plus d'un an sans la juger. Ce n'est que le 19 prairial an IV (mai 1796) qu'elle fut mise en jugement. Elle confirma ses premiers aveux, et déclara au tribunal que, si elle était libre, le bras qui avait mal atteint Boissy-d'Anglas et Camboulas les frapperait de nouveau. Elle s'opposa constamment à ce que personne prît sa défense, et conserva le plus grand sang-froid en entendant son arrêt de mort. Les apprêts du supplice même ne purent l'intimider, et elle mourut avec un grand courage, âgée de 23 ans.

M-Dj. CARLETTI (le comte FRANCOIS-XAVIER), né en Toscane vers

1730 de la même famille que le voyageur de ce nom (Voy. CARLETTI, tom. VII), jouit dès sa jeunesse d'une assez grande faveur à la cour du grand-duc, fut décoré par ce prince de l'ordre de SaintEtienne, et nommé son chambellan. Lorsque la révolution française commença, le comte Carletti, à l'exemple de son souverain, ne s'y montra point opposé, et il se déclara dans plusieurs occasions le protecteur des révolutionnaires; ce qui lui attira dans le mois de juin 1794 une assez fâcheuse aventure. Ayant été rencontré dans les rues de Florence par l'envoyé britannique Windham, qui se promenait en phaéton, il fut assailli de coups de fouet et traité hautement de jacobin. Dès le lendemain il écrivit à cet Anglais pour lui proposer un cartel qui fut accepté. Les deux champions se rendirent à Lucques avec des témoins. Carletti, qui tira le premier, ayant manqué son adversaire, celui-ci eut la générosité de tirer en l'air, et tout fut concilié. Après avoir fait secrètement plusieurs voyages à Paris, le comte Carletti fut encore envoyé dans cette ville pour y négocier un traité de paix entre la Toscane et la république française; et lorsqu'il eut signé ce traité, le 9 février 1795, il parut à la Convention nationale, où il prononça un discours d'autant plus remarquable, que c'était pour la première fois, depuis le renversement de la monarchie, que la France avait de pareilles relations avec un souverain. Le comte Carletti déclara dans

ce discours que le jour où il avait signé un traité avec la république française était le plus beau de sa vie... Le président Thibaudeau ne répondit pas avec moins de politesse, et un décret lui ordonna de terminer

cette cérémonie, selon l'usage de ce temps-là, par l'accolade fraternelle que l'envoyé toscan reçut au milieu de nombreux applaudissements. It resta ensuite à Paris comme ministre de Toscane, et fut comblé de beaucoup d'égards par le nouveau gouvernement. Mais cette faveur dura peu (1); Carletti se souvint qu'il était envoyé d'un prince autrichien et de la république (2); et le ministre

que la fille de Louis XVI, cousine de son souverain, était captive dans la prison du Temple. Ayant appris que cette princesse allait être remise à l'Autriche, il crut qu'il était de son devoir de ne pas la laisser partir sans lai présenter ses compliments, et il en demanda la permission au ministre de l'intérieur. La lettre qu'il écrivit à cette occasion est très-remarquable, si l'on se reporte au temps et aux circonstances dans lesquelles elle fut écrite: « Comme seul « ministre étranger en France, disait-il, qui représente un souverain parent de la susdite fille de «Louis XVI, je crois que si je ne « cherchais par des voies directes « à faire une visite de compliment à la prisonnière illustre, en présence de tous ceux qu'on jugerait à « propos d'y admettre, je m'exposerais a à des reproches et à des tracasseries, d'autant plus qu'on pourrait supposer que mes opinions politiques « m'ont suggéré de me dispenser de cet acte de devoir... Au reste quelle que soit la détermination « du gouvernement français, je la respecterai sans murmure, et je « me permettrai seulement de fai

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«re connaître à qui il appartien-4 « dra, que je n'ai pas manqué d'insister, sans présenter pourtant au cune demande officielle.» Cett lettre mit les cinq directeurs dans un grand courroux. Ils firent cesser aussitôt toute espèce de relations avec le comte Carletti, et lui enjoignirent de se retirer sans délai du territoire

Charles Lacroix fut chargé d'informer le grand - duc de Toscane que son envoyé avait essentiellement manqué à ses devoirs en se permeltant de vouloir rendre de préten dus devoirs à une personné que les lois constitutionnelles de la répu blique ne considéraient que comme un individu isolé et sans qualité... Obligé de quitter la France, le comte retourna dans sa patrie, où le grandduc ne parut pas mécontent de sa conduite; mais, craignant de s'exposer an ressentiment du gouvernement français, ce prince se garda de l'employer; et il s'en garda bien da vantage encore lorsque, dès l'année suivante, le général Bonaparte enva hit l'Italie (Voy. FERDINAND de Toscane, au Supp.). Réduit ainsi à vivre dans la retraite, Carletti mourut le 11 août 1803. M-bj.

CARLIER (NICOLAS-JOSEPH), né à Busignies près de Cambrai, le 20 juillet 1749, mourut à Valenciennes en 1804. Fils d'un agriculteur qui faisait aussi le commerce des toiles, il prit l'état de son père;

(2) On blama généralement cette mesure du Directoire, comme puérile et impolitique. L longue note explicative et apologétique, in sérée au Moniteur et revêtue de la signator Lenoir-Laroche, ne fit pas revenir le pubi de l'opinion qu'il s'était formée sur cette affaire Le comte Carletti fut vivement affecté de set renvoi. Aussi écrivait-il à un des conseillers de légation « J'ai vu souvent la mort de pr. « avec quelque courage. Je n'en ai point pour supporter le coup qui me frappe. » Lettre du 3o nov. 1795.

mais il consacrait tous ses loisirs à l'horlogerie, à la menuiserie et à l'ébénisterie. A la mort de son père il se trouva tuteur de trois enfants en bas âge, et fut obligé de consa crer tous ses instants aux intérêts de sa famille. Après s'être marié il vint s'établir à Valenciennes et remonta son atelier de mécanique, d'où sortirent des ouvrages d'un poliet d'un fui parfaits, tels que des pendules à carillon ou organisées, des pianos, etc. Pendant le siège de Valenciennes en 1793, Carlier se signala par son courage et son adresse: un jour, dans le fort du feu de l'ennemi, il s'aperçut qu'une écluse venait d'è tre brisée par la bombe dans le faubourg de Marly; malgré la force du courant, il se fait descendre dans la rivière, suspendu sous les bras par des cordages, demande des paillasses, des sacs à terre, les place, et ne sort de l'eau qu'après que tout est bouché : ce qui préserve la ville d'une inondation. It fut chargé quelque temps après de l'établissement d'un arsenal dans la maison des chartreux de Bruxelles. Les ateliers furent terminés en six mois. Rentré dans ses foyers, il se livra de nouveau à la partie de la mécanique qui Iui était si familière. Il conçut, entreprit et exécuta une machine tout entière en cuivre, propre à filer la laine; il y avait cinq ans qu'il y travaillait quand la mort l'enleva. Carhier avait toujours ouverts, dans son atelier, les volumes de l'Encyclopédie qui contiennent les planches de la mécanique. A. BT.

CARLISLE (FREDERIC HOWARD, comte de), né le 28 mai 1748, ccéda, dès sa ouzième année, aux ti res et à la fortune de son père. A t ses études au collège d'Eton où commencèrent ses liaisons avec lord Mor

peth, et où son talent pour la poésie le fit remarquer. Il entreprit ensuite, selon l'usage des Anglais, le voyage continental de rigueur, et revint à sa majorité prendre possession de son siège dans la chambre haute. Il disputait alors à Fox la palme de l'élé– gance, de la fashionabilité; et ces passe-temps juvéniles ne l'empêchaient pas de s'occuper d'affaires sérieuses. L'instruction et la facilité qu'il montra dans la chambre des pairs le firent distinguer : George III le nomma membre du conseil -privé et trésorier de sa maison. Lorsque les querelles entre les colonies américaines et la métropole éclatèrent, la modération avec laquelle lord Carlisle avait vu les évènements dès leur origine, le fit choisir, en 1778, comme chef de la seconde députation envoyée pour essayer une conciliation. Mais chaque jour accroissait les prétentions des colons. La mission de Carlisle et de ses deux collègues, Johnston et Eden (depais lord Auckland), n'eut aucun succès, malgré l'habileté que déployèrent les négociateurs. Au reste, on peut douter que le ministère complåt vraiment sur l'acceptation de ses propositions, et il est permis de croire que le véritable but des commissaires était moins de négocier que d'observer et de semer la discorde. Sous ce double rapport leur voyage ne fut pas sans fruit. De retour en Angleterre Carlisle accepta la place de lord lientenant du district oriental (East Riding) du comté de York, qu'en octobre 1780 il quitta pour le poste bien autrement important de viceroi d'Irlande. Le séjour qu'il fit dans cette île fut de trop courte durée pour que son administration put produire de grandes améliorations. D'ailleurs,

tout en y montrant de bienveillan tes intentions quant au redressement des abus et au soulagement des maux individuels, il ne cessa pas d'être l'ami du gouvernement bien plus que celui de l'Irlande. Dans les parlements irlandais il s'exprimait constamment en faveur de la prérogative britannique, et lorsqu'il fut remplacé dans la vice-royauté, en avril 1782, il travaillait à faire adopter le rapport du statut de George I qui garantissait à l'Irlande une existence Législative indépendante. Il n'en regut pas moins, à son départ pour l'Angleterre, le vote ordinaire de remerciments de la chambre des communes d'Irlande, pour la sagesse de son administration. Ce qui faisait ainsi rentrer Carlisle dans la vie privée, c'était la chute de lord North amenée par la solution désastreuse de la guerre d'Amérique. Quelque temps après pourtant, lors des mutations qui suivirent la mort du marquis de Rockingham, il fit partie du cabinet en qualité de lord du sceau-privé. Mais il ne garda cette position que peu d'années. En 1789, dans les discussions relatives à la régence, il se déclara contre l'opinion du premier ministre (Pitt), en faveur du système qui déférait la régence à l'héritier présomptif de la couronne, et qui en conséquence déclarait inutile et même anti-constitutionnelle l'intervention du parlement dans le choix d'un régent. Cette opposition au système de Pitt éclata plus vivement en 1791, à l'occasion du message de la couronne annonçant que l'Angleterre allait armer pour arrêter les envahissements de la Russie, et faire signer la paix entre cette puissance et l'empire ot toman. Lord Carlisle, avec beaucoup d'acrimonie, développa la thèse qu'il était impossible à la chambre de sa

voir si le ministère comptait secourir la Porte, ou mettre à exécution quelques autres de ses plans; et de cette allégation générale il en vint à critiquer tout le système des rela tions extérieures. Il ne montra pas des dispositions moins hostiles lors que lord Porchester (9 avril 1791) déposa sur le bureau de la chambre haute trois motions tendant à terminer la guerre qui s'était engagée entre la compagnie des Indes et le nabab d'Arcote, à l'occasion de la vente de deux forts par la compa guie hollandaise des Indes au radjah de Travancor. En soutenant ces résolutions, Carlisle avança que toute nouvelle guerre dans les Indes serail impolitique et immorale, et qu'au lieu d'attaquer le Maïssour, la GrandeBretagne devait toujours voir dans Tippoo son allié naturel, et dans les Mahrattes seuls des ennemis. Tou tefois il se crut obligé d'ajouter que rien, dans toutes ces critiques, n'éta dirigé contre lord Cornwallis qu'i avait engagé, lui tout le premier, às charger du gouvernement des Indes L'année suivante il appuya la mo tion de lord Porchester, à desse de censurer la conduite du ministè qui avait continué ses armements co tre la Russie. Il fut aussi l'antag niste du bill qui proposait un amé gement à plus longue période, p les bois de haute-futaie de la For Neuve dans le comté de Southan ton, et prétendit que cette avait pour but, non pas la forma d'une réserve d'une réserve pour la marine, quelque marché dont le secrétair trésor n'ignorait pas le mystèr Vers la fin de l'année, se rapprocha des ministres, moins se tint dans cette espèc tiers-parti qui semblait ne faire commune avec eux qu'à la vu

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excès de la révolution française. Le 26 déc. 1792 il votait en faveur de l'alien bill, puis ajoutait que si jadis, et plus d'une fois, il avait souhaité un changement de ministère, il ne le souhaitait plus; car un ministère nouveau débuterait par entamer des négociations avec la France, et quoi de plas impolitique dans la circonstance actuelle! Le 1er fév. suivant, à propos d'un message gouvernemental, annonçant l'augmentation des forces militaires, il se récria contre ceux qui s'opposaient aux demandes ministérielles. En 1794, l'anniversaire du 21 janvier lui fournit une occasion de répéter cette profession de foi; et bientôt il s'y montra fidele en s'opposant à la motion du marquis de Landsdown, dont le but était de traiter avec la France. Le 22 mai il se déclara pour la suspension de l'habeas corpus, et il appaya derechef par un discours Létrier suivant. Dans l'intervalle, l avait eu lieu de dire toute son opinion sur l'intervention en maere gouvernementale d'une nation chez une autre; et il avait expriné des principes dont personne ae contesté la vérité, mais dont on efase souvent l'application. Les raintes d'une seconde invasion de Irlande par les Français excitèrent meore & verve au commencement 1797; mais en appuyant les res da ministère il censura la gence de l'amirauté, à laquelle avait pas tenu que l'audacieuse édition de Hoche ne mit l'Irlande

. I fut aussi amer, le 3 mai tant, en blåmant le silence que le bernement jugeait à propos de Her sur les circonstances de la c des matelots. Ces reprosez justes du reste, quoique é supérieure qui avait pré

sidé à l'expédition de Hoche et à la ligue des Irlandais - uuis expliquât assez comment le ministère britannique s'était trouvé en défaut, témoignaient de l'impatience avec laquelle Carlisle attendait sa rentrée au cabinet. Pitt, afin de le faire patienter, l'avait décoré de l'ordre de la Jarretière; mais cette faveur datait déjà de quatre ans, et Carlisle n'était toujours que simple membre de la chambre haute. En 1799 il appuya la réunion de l'Irlande, réunion que tant de secousses rendaient nécessaire, mais qui seule était loin de pouvoir cicatriser tant de plaies saignantes. En 1800 il se prononça contre les ouvertures de paix que le gouvernement consulaire venait de faire à la Grande-Bretagne : « Ce « n'est pas ici, dit-il, une guerre co«loniale, ce n'est pas une guerre « d'opinion; c'est une guerre de prin«cipes, guerre à nos lois, à nos libera tés, à notre religion, à nos paatrimoines accepter la paix avant « qu'une pleine sécurité renaisse pour « tant de biens qui doivent nous être « précieux, serait la ruine de l'Angle« terre. Puis, toujours mécontent du cabinet, il ajoutait : « J'ai une haute idée de messieurs les ministres, mais qu'ils ne viennent pas jeter sur nos épaules le fardeau de la responsabilité qui doit peser sur les leurs.» Ceci pouvait se traduire en ces termes: « Qui n'a point les bénéfices ne doit point avoir les charges. » Personne ne s'y méprit. Un nouveau bill pour la suspension de l'habeas corpus trouva en lui un champion,

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quoique, dit-il, les effroyables principes qui ont nécessité cette mesure sommeillent maintenant. >> L'année suivante, lorsque Pitt céda la place au ministère Addington, Carlisle, que ses antécédents éloignaient

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